Le mobilier USM investit Lascaux

Le mobilier USM investit Lascaux

Le mobilier USM, imaginé en 1963 par Fritz Haller et Paul Schärer junior – hyper fonctionnel et modulaire, construit autour d’une boule de liaison particulièrement ingénieuse qui reçoit des axes eux-mêmes accueillant des étagères, des tiroirs et tous les systèmes de rangement indispensables – s’équipe d’un système d’alimentation et d’éclairage intégré.

Réalisé par le cabinet de scénographie Casson Mann et les architectes Snøhetta et SRA, la réplique intégrale de la grotte de Lascaux, dite Centre International de l’Art Pariétal, a aménagé ses espaces d’accueil, sa boutique et ses bureaux avec du mobilier USM, non équipé de ce nouveau système d’éclairage.

LASCAUX CENTRE INTERNATIONAL DE L’ART PARIÉTAL
LASCAUX CENTRE INTERNATIONAL DE L’ART PARIÉTAL
LASCAUX CENTRE INTERNATIONAL DE L’ART PARIÉTAL

Une alimentation sans fil, des lignes de LEDs intégrées dans des tubes invisibles, des chargeurs invisibles une fois hors tension permettent la mise en lumière du mobilier et de son contenu et permet l’alimentation de tous les appareils mobiles.
Pour les bureaux, l’habitat, les espaces publics – musées, boutiques, ou médiathèques. Petit miracle de la technologie, il suffit de 18 LEDs, pour assurer une puissance d’éclairage de 60 lumens. Les effets lumineux peuvent varier de blanc froid (5700K) à blanc chaud (2700K) pour une durée de vie supérieure à 40000 heures d’utilisation. Un e-chargeur USB offre une alimentation de 5V. Les lignes de LEDs et le e-chargeur sont remplaçables et interchangeables en quelques secondes et sans outils.
La structure du meuble est raccordée à une source d’alimentation. La structure elle même conduit l’électricité basse tension.

Les parois en verre peuvent être éclairées de tous les côtés, les parois métalliques par l’avant, les rayons coulissants entièrement éclairés, les portes abattantes ou coulissantes bénéficient d’une fonction allumage à l’ouverture du compartiment, les tablettes inclinées peuvent être éclairées par l’avant. Le dessous du meuble est éclairé au sol sous un angle de 25 degrés. Une lumière orientée vers l’arrière, horizontalement, diffuse une lueur diaphane tout autour du meuble.

Trois questions à Christine Leconte,  présidente de l’Ordre des architectes d’Île-de-France

Trois questions à Christine Leconte, présidente de l’Ordre des architectes d’Île-de-France

Christine Leconte a été élue présidente du Conseil de l’Ordre des architectes d’Île-de-France (CROAIF) le 24 octobre dernier. Elle nous livre lors d’un entretien les grands axes qui structureront ses trois ans de mandature à la tête de cet Ordre régional rassemblant près de 1/3 de la profession.

« Nous voulons mettre l’architecte au service des territoires »

 

Christine Leconte © Karine Smadja

CREE_Votre élection à l’Ordre, à la suite de Jean-Michel Daquin, s’inscrit dans une dynamique de continuité : vous êtes comme lui membre de « Mouvement », une liste réélue à la tête du CROAIF depuis 20 ans. Quel bilan tirer de cette double décennie ? Quelle impulsion souhaitez vous donner à ce poste, comment éviter une « usure du pouvoir » qui guette les longs mandats ?

Christine Leconte_Il me semble qu’après 20 ans d’action de « Mouvement », une liste qui avait été créée en 1996 par des architectes désireux d’insuffler une nouvelle dynamique à une institution qu’il jugeait poussiéreuse, le sempiternel reproche « mais que fait l’ordre ? » s’entend moins dans la profession. Au contraire, beaucoup d’architectes se disent prêts à soutenir nos actions et pas seulement en parole. Et nombre d’acteurs publics sont en attente de nos expertises. Les dernières élections ordinales tant régionales que nationales ont mis en lumière via les réseaux sociaux l’envie des architectes de davantage partager avec l’Institution. Une manière également de rompre l’isolement dans lequel plusieurs de nos consœurs et confrères se trouvent. Mon élection à la présidence témoigne d’une volonté d’élargir la représentation de la profession au-delà des architectes exerçant la maîtrise d’œuvre. La diversité de mon parcours — exercice en agence, missions de conseil dans un CAUE, enseignement, architecte conseil de l’État — montre qu’il est possible d’exercer notre métier sous diverses formes. Nous voulons tenir compte des mutations de la profession, ouvrir l’Ordre à une multiplicité d’architectes, qu’ils soient enseignants, journalistes, AMO — tous les champs sont ouverts tant que l’architecte n’est pas subordonné d’une entreprise. La finalité est de pouvoir mieux exercer notre mission, qui est celle d’un professionnel au service des territoires et non plus un architecte démiurge. Une vision de la profession très partagée, notamment par les jeunes générations.

Atelier kaplas lors des journées portes ouvertes 2016 © CROAIF

CREE_Le CROAIF mise aujourd’hui beaucoup sur le rapprochement avec les élus locaux. Nombre de communes petites et moyennes en quête d’habitants et d’emploi acceptent la création de lotissement ou de zones d’activités, favorisant l’étalement urbain. Et le constat qu’un maire dépense plus pour son feu d’artifice du 14 juillet que pour son plan d’urbanisme se vérifie toujours. Malgré cela, pensez-vous que les élus locaux restent les meilleurs alliés des architectes pour la défense de la qualité architecturale ? Quels rapports entretenez-vous avec les quelque 1200 maires que comporte la région Île-de-France ?

CL_Les architectes partagent avec les élus un projet de transformation du cadre de vie. Les élus locaux ont les outils et sont en contact avec une population de plus en plus concernée par la qualité de son environnement bâti — en témoigne l’écho suscité par les articles de Télérama sur la « France moche » et les interrogations autour des entrées de villes. Les documents d’urbanisme évoluent : grâce aux intercommunalités et aux PLUi, on peut espérer que le nombre de PLU qui ne sont que des POS déguisés diminue au profit de véritables outils de projet pour les territoires. La question est plutôt d’arriver à mobiliser les habitants autour des documents et souligner leur rôle de véritable projet de ville ou de territoire, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. J’ai en tête l’exemple d’Aurillac, ou seulement 60 habitants sur 26 000 se sont impliqués dans les réunions de concertation accompagnant les différentes phases de l’élaboration du PLU. Dans le même temps, 500 personnes visitaient l’exposition du projet Europan qui doit transformer la zone du cœur de ville. Il faut de notre côté développer un véritable service public de l’architecture, afin que l’habitant perçoive de l’urbanisme autre chose que des règles incompréhensibles le contraignant à clôturer sa parcelle quand il voudrait la laisser ouverte, ou imposant des nombres d’étages et des surfaces pleine terre sans qu’il sache bien pourquoi.

Logement : 10 mesures pour construire mieux. Un exemple des nombreux documents édités et diffusés par l’Ordre des architectes d’Île-de-France © CROAIF

CREE_Implanté sur une région qui rassemble près de 30 % des architectes français, l’Ordre en Ile-de-France est un cas à part dans le panorama des ordres régionaux. Cette taille vous donne-t-elle un rôle moteur ? Comment s’organisent vos relations avec les autres ordres régionaux et le Conseil national ? Quelles actions comptez-vous porter pour interpeller l’État, d’abord, et auprès du public d’Île-de-France, ensuite ?

CL_Nous représentons 1/3 des architectes français, mais tout comme les autres Ordres régionaux, notre action s’inscrit en faveur de l’intérêt public de l’architecture. Nous travaillons en étroite collaboration avec l’Ordre national, la situation géographique de l’Île-de-France impliquant souvent des connexions avec des problématiques ou des échelles nationales. À côté de nos missions régaliennes — la tenue du Tableau, la surveillance du respect de la déontologie, la formation —, nous nous impliquons sans corporatisme dans les questions qui touchent la société francilienne et nos concitoyens. C’est la mission institutionnelle de l’Ordre. Au niveau national et régional, l’Ordre des architectes a par exemple participé à la mise en œuvre de la loi LCAP.

Journée d’informations des lycéens sur les métiers et études d’architecture. Février 2017 © CROAIF

Aujourd’hui, il s’agit notamment sur le plan législatif d’interpeller l’État dans le cadre de la future loi Logement. Le sondage réalisé par la « République en Marche » dans le cadre de la stratégie logement affirme que la qualité du logement préoccupe 60 % de la population. La profession par son expertise se saisit du sujet : on ne peut se contenter de le traiter seulement sur un plan financier ou administratif, en fixant des objectifs chiffrés de construction déconnectés de la réalité. Il faut nous attacher à répondre aux besoins et attentes des habitants, des territoires. Nous faisons des propositions pour porter la qualité spatiale du logement, les enjeux de la réhabilitation, la question des copropriétés dégradées. Le maintien voire l’élargissement de la procédure de concours fait ainsi partie de nos exigences dans cette Loi. Nous développons également de nombreux partenariats : à l’échelle régionale comme nationale, nous nous sommes par exemple rapprochés de l’ADEME pour travailler sur les enjeux environnementaux. À d’autres échelles, nous nous engageons également en accompagnement de la MGP notamment pour une « métropole pour tous », où les technologies de la SMART CITY sont des outils mis au service des populations et ne répondent pas exclusivement à de nouveaux « besoins » créés par des opérateurs privés.
En parallèle, plusieurs de nos conseillers contribuent à enrichir animent des travaux extérieurs sur ces questions à partir des échanges des groupes de travail internes : commande privée ; commission des marchés publics, groupe architecture et particuliers, transition écologique… En 2018, comme les années précédentes, nous engageons de nombreuses actions et portons des propositions sur la métropole, l’aménagement raisonné du territoire, le logement… Ceux en y associant tous les acteurs volontaires et nos publics pour « faire la ville ensemble ».

Propos recueillis par Olivier Namias

Les lauréats d’Europan 14 imaginent des villes productives 2/3

Les lauréats d’Europan 14 imaginent des villes productives 2/3

La semaine dernière, nous vous avons dévoilé des projets lauréats de la 14ème édition du concours Europan. Plus principalement ceux du site de Guebwiller, dont les attraits paysagers et touristiques ont su attirer plus de 42 équipes candidates ; et de Grigny / Ris-Orangis, dont les stigmates d’un urbanisme totalitaire n’ont attiré qu’une quinzaine de candidats. Aujourd’hui, nous continuons de vous dévoiler les rendus d’autres équipes lauréates sur les 11 sites de projets proposés. Les rendus sur les 4 derniers sites vous seront présentés dès le 20 décembre.

 

Amiens

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Angers

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Aurillac

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Bègles

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Besançon

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Pour mieux comprendre les enjeux du concours et des différents sites, lire aussi :  Europan 14 : les villes productives ainsi que les volets 1 et 3 des résultats du concours Les lauréats d’Europan imaginent des villes productives 1/3 et Les lauréats d’Europan imaginent des villes productives 3/3

 

 

Remise du prix des femmes architectes 2017 : 8 personnalités à l’honneur

Le 11 décembre 2017, l’ARVHA (Association pour la recherche sur la ville et l’habitat) dirigée par Catherine Guyot, a présenté au Pavillon de l’Arsenal à Paris le palmarès du « Prix des femmes architectes 2017 » 5ème édition. Cette distinction bénéficie du soutien de différentes institutions comme le ministère de la Culture, la Ville de Paris, le Conseil National de l’Ordre des Architectes et le Pavillon. Ce prix a pour but de mettre en valeur les œuvres et les carrières de femmes architectes et d’encourager la parité dans une profession à forte dominante masculine. Un jury international* exclusivement féminin et présidé par l’architecte Eva Alvarez, a eu pour mission d’étudier 820 projets déposés et le parcours des 280 femmes architectes candidates. Quatre prix ont été attribués, ainsi que trois mentions spéciales soit 5 distinctions supplémentaires par rapport à l’an dernier. De quoi ravir plus de femmes architectes, ou banaliser cette distinction. 

Le prix de la Femme Architecte est attribué à Sophie Berthelier, cofondatrice avec Benoît Tribouillet de l’agence SBBT Architecture. L’architecte se dit sensible à la matière, s’intéressant à des matériaux alors peu usités, qu’elle cherche à employer en effaçant la technique pour souligner leur poésie. 5 projets ont été mis en lumière lors du prix, notamment le macro lot à Bordeaux Euratlantique pour la société Clairsienne, récemment remporté. Les architectes ont établi un canevas commun où tramage horizontal et vertical en dessine les composantes. Ainsi, ils travaillent sur des programmes interchangeables, abordant les questions de mutabilité et de pièce en plus, le tout sous des panneaux blancs et autres matériaux réfléchissants. La mention spéciale récompense Dominique Marrec, associée d’Emmanuel Combarel (un homme) au sein de l’agence ECDM. 

Le prix de l’Œuvre originale est décerné à Cécile Mescam pour la Maison du recueillement du cimetière de Dinan. Fondatrice de l’agence Onzième étage, elle prône le potentiel du déjà-là, ce qui se retrouve dans ce projet construit le long du mur du cimetière, entre pierre et bois, verre et métaux, public et intime, dedans et dehors, vie et mort.

Le prix Jeune femme architecte, destinée aux femmes de moins de 40 ans, est attribué à un duo : Axelle Acchiardo et Linda Gilardone cofondatrice de l’agence LA Architectures. Après avoir mené des carrières séparément à Paris et à l’étranger, elles nourrissent aujourd’hui leurs travaux de leurs parcours respectifs. 5 projets ont été primés, dont le Site de Boissières à Montreuil qui avait déjà reçu le prix de la première œuvre en 2014. Dans un îlot urbain aux volumes bâtis variés et hétérogènes, deux corps de bâtiments en R+2 de part et d’autre d’une faille mettent en relation la rue et l’intérieur de l’îlot, tout en assurant des transitions de l’un à l’autre par des passerelles. Une mention spéciale est décernée à Marie Blanckaert, agence BLAU. 

Le prix International récompense Carme Pinós, architecte espagnole qui a fondé son agence en 1991, après avoir été associée d’Enric Miralles, et enseigne dans de nombreuses universités. Distinguée elle aussi pour cinq de ses projets, dont le plus emblématique semble la Tour Cube de Guadalajara (Mexique). À la contrainte de construire un seul bâtiment sur une surface au sol restreinte, mais une hauteur illimitée, elle répond par une masse orthogonale en suspension, supportée par trois colonnes, trois nœuds concrets contenant services et circulations. En 2011, elle avait remporté la consultation Saint-Dizier 2020, définissant le plan urbain de la cité bragarde à l’horizon de la décennie. Une mention spéciale est attribuée à l’architecte sud-africaine Carin Smuts._Amélie Luquain

 

* Le jury était composé de représentants de l’Ordre des Architectes Français, Béatrice AUXENT ex-présidente et conseillère du CROA Haut de France, les lauréates du Prix 2016, Véronique JOFFRE, Ingrid TAILLANDIER, Tania CONCKO, Amelia TAVELLA, et Silja TILLNER architecte autrichienne membre fondatrice du Women in Architecture de Vienne, Fulvia FAGGOTO architecte italienne membre fondatrice de l’Association Donne Architetto, la Présidente du Jury, Eva ALVAREZ, architecte espagnole professeur à l’université polytechnique de Valence et de Catherine GUYOT directrice de l’ARVHA. 

Crédits photos : ©Charly Broyez / ©S.Chalmeau

 

Entretien avec BRUMM : filmer l’architecture

Entretien avec BRUMM : filmer l’architecture

Brumm Films & Formes est un studio de production audiovisuelle installé à Bordeaux, qui vise à raconter l’architecture. Lucas Bacle, architecte et gérant de l’agence, a commencé cette pratique à l’âge de 24 ans. 5 ans plus tard, son travail a beaucoup évolué. Initialement reporter d’images répondant à des commandes d’agence d’architecture, il s’oriente aujourd’hui vers une pratique plus artistique. 

 

 

CREE : Vous êtes architecte et réalisateur de film traitant de l’architecture. Comment a débuté cette pratique ? 

Lucas Bacle : Lorsque j’ai commencé mes études à l’école d’architecture de Bordeaux, je n’avais aucun bagage artistique. J’y ai découvert le monde de la conception et très rapidement, je me suis intéressé à de nombreux supports, très certainement comme beaucoup d’étudiants d’école d’art. Les trois premières années, l’architecture, en tant que discipline fondamentale, est restée le guide. Petit à petit, la vidéo est devenue un médium très intéressant. Plus que des textes conceptuels, elle a cette capacité à traduire des émotions, des histoires qui peuvent toucher directement l’humain. J’ai utilisé la vidéo pour mes rendus de projet, jusqu’à mon diplôme qui a été le travail audiovisuel le plus fourni, traduisant la poésie et les ambiances du projet. Dans le même temps, je me suis créé un réseau dans le milieu de la production avant de travailler deux ans pour l’agence d’architecture bordelaise Leibar Seigneurin, pour lesquels j’ai commencé à produire des reportages filmés et qui m’ont encouragé à poursuivre dans cette voie.

 

CREE : Vous avez fondé le studio de production audiovisuelle BRUMM, et commencé par répondre à des commandes. Comment ça se passe avec les agences d’architectures ?  

LB : Chaque commande est différente. En 2015, je voulais réaliser un film sur un projet que j’avais considéré comme étant ma propre « équerre d’argent ». J’ai réalisé un court métrage avec l’agence Fernandez et Serres dans un centre culturel à Vertou (44). Sans le vouloir, j’ai visé juste. Cette année-là, ils reçoivent l’équerre dans la catégorie « Culture, jeunesse et sport ». Content du reportage, ils nous eux aussi recommandé. C’est ainsi qu’a débuté la pratique de l’agence.

 

CREE : Peut-on faire des parallèles avec les commandes de reportages photographiques ? 

LB Les parallèles avec la photographie me semblent essentiellement esthétiques. J’adore l’image, la produire, la voir. La photographie est pour moi un exercice continu. Elle me permet de m’entraîner sur des cadrages, de penser l’image, de rester éveillé et vif sur la façon dont on produit l’image. Mais je ne suis pas photographe. La photo est comme une esquisse du projet, elle me permet de poser des cadres avant de commencer à tourner. Plus standardisée dans la pratique de l’architecture, elle est aussi un hameçon pour attirer le client. 

 

CREE : Quel est votre apport dans la production cinématographique en tant qu’architecte ? 

LB : Mes cadrages sont peut-être plus radicaux. Ils suivent les lignes, ou les perturbent. Mais je pense que mon apport consiste surtout sur la manière dont on peut parler d’architecture et la raconter. L’architecture a tellement de facettes, il faut être capable d’en parler à tout le monde, y compris à des non-adeptes. Un des moyens est le story telling, pour y amener de l’humain, de la poésie. Je voulais faire des fictions. Au début, je faisais des reportages assez simples avec des voix off. Puis j’ai appris à maîtriser les outils de montage, la post production, le tournage, l’écriture. Et j’ai gravi les échelons petit à petit, passant de film institutionnel, si ce n’est corporate, à des travaux à la fibre de plus en plus artistique, plus proche de celle de Beka & Lemoine. J’ai travaillé sur des films scénarisés, j’ai commencé à penser l’histoire jusqu’à y insérer des acteurs. Ce n’était plus l’image qui primait, mais celle-ci devait, dans ses formes, répondre au déroulement de l’histoire. Une accélération du mouvement répond à une accélération narrative, des caméras embarquées permettent de suivre le personnage … L’architecture n’est alors plus le faire valoir, elle est une évidence est non plus le centre du sujet. Elle devient presque un décor pour l’histoire. Je sors de l’architecture pour raconter autre chose et en proposer une vision décalée. C’est comme de créer une œuvre sur une autre.

 

CREE : Votre travail s’oriente vers une pratique de plus en plus artistique, notamment avec le projet Voie Urbaine présentée à Agora Bordeaux. 

LB : J’ai toujours aimé les histoires qui cachent des choses et qui ne sont pas toujours évidentes, voire évanescentes. Voie Urbaine, c’est un ensemble de fiction sur la ville de Bordeaux. L’une d’entre elle traite d’une architecture fantomatique, d’un manoir qui paraît hanté, dans lequel un guide clochardisant vient faire un tour du propriétaire. Une autre traite de la base sous-marine de Bordeaux construite pendant la guerre, d’un prisonnier français qui a fini emmuré dans le béton. Ces histoires se basent sur des légendes urbaines. En travaillant sur le caractère fictionnel, j’essaie de faire rentrer dans la tête des gens la puissance de ces lieux, qui sont marquants même s’ils sont oubliés ou désuets. J’essaie de conscientiser ces architectures, un peu à la manière de Victor Hugo qui, lorsqu’il écrit Notre-Dame de Paris, sauve la cathédrale de la démolition. Là, la puissance des mots a sauvé la pierre. 

 

CREE : Vous avez cité Beka & Lemoine et Victor Hugo. Quelles sont vos autres références ? 

LB Je suis des agences, qui sont issues de l’architecture et qui font des films, notamment Factory Fifteen  ou Spirit of Space. Il y a aussi pas mal d’italien et de portugais sur ce créneau, comme respectivement The architecture Player ou The building Picture. Ce phénomène semble prendre de l’ampleur dans toute l’Europe et même outre-Atlantique. 

 

CREE : Quels sont les moyens en place dans votre studio de production ? 

LB : Dans l’agence, nous sommes trois personnes à plein temps. Nous travaillons régulièrement avec des intermittents, que ce soit des développeurs, des vidéastes ou des acteurs. Sur un tournage, nous sommes en moyenne 4 personnes. En termes de matériels, ça dépend toujours des besoins, mais il est souvent conséquent. Quand à l’argument de tourner à l’iPhone, comme Gondry l’a fait avec « Détour », c’est en réalité totalement impossible. La réalisation de ce court métrage mobilise toute une équipe d’au moins une cinquantaine de personnes, et l’iPhone est équipé d’objectifs supplémentaires, de systèmes de prise de son et autres, comme les travellings, rails et grues. Un iPhone dans la main de quelqu’un qui ne sait pas cadrer, ça ne produit rien. Il ne faut pas croire que Gondry était seul.

 

CREE : Quels sont vos autres projets ? 

LB :  Je travaille avec une autre boîte de production, Saint Gingembre, qui réalise principalement des publicités pour la télévision. J’interviens en tant que chef décorateur. Je fais de l’architecture dans des films. La scénographie me permet d’être encore dans la forme, de continuer à dessiner et développer des concepts. Je veux garder un pied dans la forme. D’autre part, nous sommes lauréats d’un concours artistique en lien avec des écoles primaires lancé par l’Atelier Médicis. En résidence à Pionnat, dans la Creuse (23), nous avons pour projet de monter une Voie Urbaine bis, sauf que cette fois-ci les films seront tous connectés ce qui créera un long métrage sur la ville, coréalisé avec des enfants. Sinon, nous avons un projet de long métrage à la Chapelle de Ronchamp, où nous allons suivre un des moines qui tient la chapelle et qui connaît très bien l’œuvre du Fada. Enfin, nous travaillons sur une émission d’architecture, qui est en cours d’écriture. Et bien entendu, nous réalisons toujours des commandes pour des architectes.

 

CREE : un dernier mot ?

LB : Filmer l’architecture n’est qu’une étape, il faut la raconter. Le film pose la question sur la véritable utilité des lieux et sur ce qu’on en fait. Peut-être que c’est aussi un moyen d’être plus proche de l’agence, de ses fondements théoriques et de sa pensée. Selon moi, l’architecture est en quête de sens plutôt que de belles images. Xavier Leibar m’a donné confiance dans ce potentiel qui reste à exploiter. J’ai l’envie de rester architecte, mais par un autre moyen que le construit. Je me considère de plus en plus en tant qu’architecte qui réalise. 

 

Propos recueillis par Amélie Luquain

 

Il nous faut plus de drogues : un diplôme de l’ENSA de Lyon

Ce projet de diplôme consiste en la mise en place de deux structures place Bellecour, à Lyon. En venant côtoyer la statue équestre de Louis XIV, elles entendent questionner le vide intouchable de 62 000 m² de cet espace public. Ces deux structures n’ont d’autre fonction que leur propre présence. Elles opèrent à la manière d’un catalyseur. La mise en place d’un objet puis son abandon total devrait faire apparaître une suite de réactions, l’évolution anarchique du projet modifiant le dispositif initial.

« Il nous faut plus de drogues » formalise un questionnement personnel de l’étudiant sur l’architecture, et la manière dont elle est pensée et réalisée. Il critique un enseignement figé, qui inciterait à penser l’architecture de manière unidirectionnelle, aboutissant à une architecture lassante qui ne provoquerait pas d’émotion. Il remet en question les notions de programme, de site, de client, voire de l’architecture comme objet exceptionnel portant la griffe d’un starchitecte. L’équation (programme + site = projet) se transforme en (projet = x), x étant une donnée évoluant au cours du temps, une variable inconnue et imprévisible. Le mot drogue, vocable percutant du titre, a émergé suite à un « manque de trip architectural » ressenti par l’étudiant. Pour lui, le projet comme l’objet peuvent être assimilés à une drogue. Parce qu’ils s’inscrivent dans une société, ils ont un impact politico-social. L’aspect anarchique voire illégal de l’objet peut mener à son interdiction. Le projet peut modifier les fonctions physiologiques et psychiques.

Paru dans Architectures CREE 383

 

Diplôme de Julien Marie-Jamet

Directeur d’études : Gilles Desevedavy

Domaine d’études Alter-native(s)

ENSA Lyon

Collection Tchoban : la révolution architecturale russe s’expose aux Beaux-Arts de Paris

1917, une révolution politique et architectonique. Décrétée dès le lendemain de la prise du pouvoir par Lénine, la nationalisation du foncier offrira des conditions nouvelles pour une commande architecturale devenue entièrement publique, rappelle Jean-Louis Cohen, commissaire de l’exposition des dessins de l’avant-garde architecturale russe, présentée à l’École des Beaux-Arts de Paris. La période troublée du « communisme de guerre » qui dura jusqu’en 1920 ne laissa guère la possibilité d’implanter de nouveaux dispositifs architecturaux dans les villes : l’heure n’était pas encore aux grands chantiers héroïques, mais aux monuments éphémères chantant l’avènement du nouveau régime. L’architecture se trouvait souvent réduite à un paysage textile de bannière et de calicots, constate Jean-Louis Cohen, les morceaux de bravoure apparaissant toutefois sous forme d’architecture de papier ou et de maquettes, comme le projet de monument à la troisième internationale conçue par Vladimir Tatline en 1919. La stabilisation politique verra l’émergence de nombreux concours libérant une créativité débridée qui s’exprimera autant dans les bâtiments que sur le papier. Enterré par la normalisation stalinienne et le réalisme socialisme, cet épisode de l’histoire de l’architecture ne survivra que grâce aux familles des architectes, qui préserveront les archives, et l’action de certains collectionneurs tels Sergueï Tchoban, architecte russe installé à Berlin. Son fond comprend aussi bien le célèbre dessin de Boris Iofan pour le Palais des Soviets, projet victorieux du concours organisé par Staline en 1932, marquant symboliquement la fin des expériences architecturales des constructivistes et modernistes tels Moïsséï Guinzbourg, Ilia Golossov ou Iakov Tchernikov. Les fantaisies architecturales de ce dernier font un écho moderniste aux prisons de Piranèse, rappel d’une culture classique qui n’était pas inconnue des architectes russes les plus avant-gardistes. Elles ouvrent un répertoire formel dans lequel les architectes du monde entier viendront puiser des années plus tard, en témoignent les expériences des déconstructivistes ou les premières œuvres de Zaha Hadid, qui semblent directement inspirées des exercices de composition d’Olimpy Kisselev aux Vkhoutémas, les couleurs fluo et le fond noir en moins._Olivier Namias

Valentin Alexandrovitch Kamenski Fantaisie architecturale avec une place circulaire et un gratte-ciel Vers 1930 Lavis d’encre de Chine et aquarelle sur papier 276 x 187 mm Collection Sergei Tchoban
Iakov Guéorgiévitch Tchernikhov Composition avec des cercles et des sections de cylindres Collection Sergei Tchoban
Iakov Guéorgiévitch Tchernikhov Bâtiments industriels Collection Sergei Tchoban
Iakov Guéorgiévitch Tchernikhov Fantaisie sur le thème « Composition architecturale et combinaison de lignes droites et d’éléments curvilignes avec des volumes sphériques » Vers 1930 Perspective aérienne Graphite, encre noire et gouache sur papier 306 x 248 mm Collection Sergei Tchoban
Iakov Guéorgiévitch Tchernikhov Fantaisie architecturale Collection Sergei Tchoban

cf. Jean-Louis Cohen, Architecture de l’avant-garde russe, dessins de la collection Sergueï Tchoban, catalogue de l’exposition présenté au cabinet des dessins Jean Bonna jusqu’au 19 janvier 2018.

Exhale, le ventilateur de plafond sans pales

Exhale, le ventilateur de plafond sans pales

Inspiré de la turbine sans pale de Nikola Tesla, Exhale est un ventilateur de plafond sans pales conçu pour une ventilation totale et saine dans les hôtels.

Il utilise une technologie brevetée Vortex : au lieu de ventiler avec une colonne d’air juste en dessous du ventilateur de plafond, un flux d’air est réparti en effet cyclonique à 360° dans la pièce pour une ventilation optimale. Les disques tournent. Les molécules d’air se retrouvent éjectées à l’extérieur par la force centrifuge créant cet effet vortex.

Alors qu’en 2011, les moteurs électriques à courant alternatif représentaient plus de 96% du marché, explique la marque, Exhale utilise un moteur à courant continu qui permet de maintenir une rotation de l’ordre de 325 par minute, nettement supérieure à des ventilateurs de plafond classique, ne dépassant généralement pas les 200 RPM.  De plus, il consomme 50 à 80 % d’électricité en moins que leurs équivalents à courant alternatif. Ce ventilateur est aussi très silencieux (33dB à vitesse 1 et 40 à pleine puissance) et économe en énergie (2W au niveau 1 et 50 à pleine puissance).

Exhale pèse 11,3kg, mesure 18cm de hauteur et possède un diamètre de 86,4cm. Il intègre un éclairage LED réglable (20 à 100%). Exhale propose un design sophistiqué et épuré, en complément des chauffages et climatisations., pour un fonctionnement 24h/24 tout au long de l’année.

 

 

 

L’illustre historien et enseignant Vincent Scully s’est éteint

L’illustre historien et enseignant Vincent Scully s’est éteint

 

Vincent Joseph Scully (1920-2017)

Peu connu en France, l’historien américain Vincent Scully s’est éteint à l’âge de 97 ans. L’Université de Yale, où il enseigna 60 ans, a annoncé la mort de son plus célèbre professeur d’histoire de l’architecture. Scully eut parmi ses étudiants de futures célébrités, comme Sir Norman Foster, Robert A.M. Stern, Richard Rogers, Maya Lin (l’architecte du mémorial honorant les soldats morts au Vietnam), et même, apprend-on à l’occasion de sa disparition, l’actrice Jodie Foster. Sa thèse de doctorat portant sur les liens reliant McKim, Mead and White et Frank Lloyd Wright, faisant apparaître des continuités entre deux œuvres que l’on jugeait en rupture. Une plongée dans une architecture du 19e siècle mal aimé qui ne le conduira pas à s’opposer à la démolition de la Penn Station, des mêmes McKim, Mead and White, dans les années 60. Une erreur qu’il reconnaîtra plus tard « comme bien des modernistes de l’époque, je ne pensais pas quelle valait la peine d’être sauvée. Tout devait être nouveau ». Repenti, il aura pour la gare moderne une formule assassine : « on entrait avant dans la ville comme un dieu, on en détale maintenant comme un rat ».

Ami de Philip Johnson, Scully a aussi été un fervent soutien de Louis Kahn et de Robert Venturi, écrivant pour ce dernier la préface de « Complexité et contradiction en architecture », qu’il présentait lors de sa parution comme l’ouvrage le plus important depuis « Vers une architecture ». Leur plaidoyer pour la réintroduction de l’ornement et de l’ironie, pour la multiplicité des formes en architecture, et d’une façon plus générale, son rejet croissant de l’orthodoxie moderne, valu à Scully d’être associé au post-modernisme, a son grand dam, rappelle Richard Woodward dans les colonnes du New York Times. « Tout dans le passé attend, attend d’exploser », disait Scully. La traduction dans la langue de Molière de ses ouvrages phares, encore à faire — American Architecture and Urbanism, The Villas of Palladio, Modern Architecture – the Architecture of Democracy — aidera peut-être à allumer la mèche de nouvelles bombes historiques de ce côté de l’Atlantique._Olivier Namias

Architectures CREE 384

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Hyper Espace

Quel terme n’a pas aujourd’hui son préfixe en hyper- ? Pas le texte, qui est devenu hypertexte depuis plus de 20 ans avec internet. Pas le paysage, qui, par mimétisme, est devenu hyperpaysage — le préfixe omni- est aussi une variante acceptée. Pas les lieux, propulsés au rang d’hyper par le géographe Michel Lussault, se sauvant du néant ou l’anthropologue Marc Augé les avait abandonné. L’hypérification des marchés n’est que partielle. Réalisée depuis des années dans les grandes surfaces, elle ne s’applique pas encore au marché qui régule la vie des hommes de sa main invisible. Son extension à tous les domaines d’activités, architecture et urbanisme compris, mériterait pourtant qu’on lui accole ce suffixe. De même, l’optimisation de la sphère productive par le numérique devrait conduire à qualifier notre société contemporaine d’hyperindustrielle. Avec l’hyper-, le signe d’une intensification du monde obtenue par une pression accrue sur les ressources naturelles, donc bien peu compatible avec le développement durable que nos sociétés entendent mettre en œuvre. Une hyperarchitecture sera-t-elle capable de nous replacer dans un temps long auquel nous n’accédons plus depuis l’accélération du présent, versant temporel des dynamiques d’intensification ? Le philosophe Pierre Caye, que nous avons interviewé dans ces pages, veut le croire. Le moment de projeter des hyperespaces serait-il arrivé ?

Olivier Namias

 

Architectures CREE 384

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