Cette année 2018 marquera les 20 ans de l’ouverture au public de la Bibliothèque nationale de France. Pour l’occasion, son concepteur, Dominique Perrault, nous propose de revenir sur ce bâtiment phare à travers l’exposition : « Dominique Perrault – La Bibliothèque nationale de France, Portrait d’un projet 1988 – 1998 ».  Cet événement sera inauguré par l’architecte lui même en tant que commissaire mais aussi scénographe associé. Pour la première fois, l’histoire de la construction de ce bâtiment emblématique, aujourd’hui labellisé « Architecture contemporaine remarquable » sera présentée au public. L’exposition, qui se déroulera du 10 avril au 22 juillet 2018 à la BNF, retracera, de 1988 à 1998, le processus de création de cet édifice ayant été marqué par des débats intenses, par l’engagement de nombreux partenaires et par de multiples expérimentations jalonnant sa conception et sa réalisation.

Le 14 juillet 1988, François Mitterrand, alors Président de la République réélu pour son second septennat, émit la volonté d’offrir à la Nation une nouvelle bibliothèque nationale. En 1989, à l’issue d’un concours international, l’architecte Dominique Perrault, à seulement 36 ans, est désigné lauréat. Après le Grand Louvre, l’Opéra Bastille ou l’Institut du Monde Arabe, ce nouveau projet situé hors du Paris historique parachève la politique des Grands travaux menée durant deux septennats. Il s’agira pour l’architecte de créer « une place pour Paris, une bibliothèque pour la France », un lieu ouvert à tous, à la fois espace public et parcours initiatique.

© Dominique Perrault Architecture (DPA)

Le projet, novateur par son architecture et son inscription dans un site alors largement en friche, constitue l’acte fondateur du développement de tout un nouveau quartier de la métropole parisienne. Il est aussi une réalisation fondamentale dans la pratique de Dominique Perrault, premier exemple d’une architecture du « Groundscape » : une architecture du sous-sol envisagée comme domaine d’exploration capable de redéfinir la nature du territoire de nos cités et conçue pour dresser les contours d’une nouvelle urbanité.

© Dominique Perrault Architecture (DPA)
© Dominique Perrault Architecture (DPA)

Avec ses tours d’angles comme quatre livres ouverts se faisant face et qui délimitent un lieu symbolique, la Bibliothèque de France, lieu mythique, marque sa présence et son identité à l’échelle de la ville par le réglage de ses quatre coins. Ces balises urbaines mettent en valeur le « livre » avec un mode d’occupation aléatoire des tours qui se présente comme une accumulation du savoir, d’une connaissance jamais achevée, d’une sédimentation lente mais permanente. Autres métaphores complémentaires, qu’elles se nomment tours des livres, ou silos, ou étagères immenses aux rayonnages innombrables, ou labyrinthes verticaux, l’ensemble de ces images sans ambiguïté converge vers une identité forte de ces objets architecturaux.

© Dominique Perrault Architecture (DPA)

L’installation d’une place fonde la notion de disponibilité de trésor, les tours ont permis de le repérer et de l’identifier comme culturel. L’espace public offrira le contact physique, direct et naturel entre l’institution sacrée et l’homme de la rue. L’incrustation d’un jardin achève la mise en place symbo- lique du projet, en offrant un lieu de calme à l’abri des nuisances de la ville. Tel un cloître, cet espace serein favorisera la méditation et l’épanouissement du travail intellectuel.

© Dominique Perrault Architecture (DPA)

En 1996, Dominique Perrault a d’ailleurs reçu le Prix Mies van der Rohe pour son œuvre : aujourd’hui, l’esthétique de la Bibliothèque François-Mitterrand, son minimalisme, ainsi que les matériaux utilisés, le verre et le fer, font référence.

© Dominique Perrault Architecture (DPA)

Pensée et mise en scène par l’architecte et son équipe, l’exposition sera séquencée en quatre thématiques. Les deux premières présentant l’objet architectural et son inscription dans un territoire, jalon d’un développement urbain que l’on connait aujourd’hui. La troisième mettra l’accent sur le vide emblématique que l’architecte a voulu placer au cœur du projet, le jardin, création inédite d’un véritable morceau de forêt à quelques mètres de la Seine. Le dernier volet de l’exposition plongera dans les détails des aménagements intérieurs et du mobilier, conçu spécialement pour le lieu. Présenté pour la première fois, l’essentiel du fonds provient des archives de Dominique Perrault. Quelques pièces sont issues des collections publiques du Centre Pompidou et du Centre FRAC Centre. 

© Dominique Perrault Architecture (DPA)
© Dominique Perrault Architecture (DPA)

Les visiteurs découvriront une grande variété de documents : croquis, dessins techniques, diapositives et ektachromes, photomontages, perspectives numériques ou réalisées à la main, maquettes d’études et de concours à différentes échelles, échantillons de matériaux, prototypes, etc. Ces pièces révèlent une période charnière pour l’architecture et la construction, à la jonction entre travail manuel de précision et débuts de l’informatique : alors que les documents du concours furent intégralement dessinés à la main, les outils numériques furent introduits au cours du développement du projet et jusqu’à la fin du chantier. L’ensemble de ces documents d’archives témoigne d’un chantier d’une rare ampleur. 

Pour comprendre davantage son oeuvre, le 24 avril prochain, les Mardis de l’architecture recevront l’architecte dans le cadre d’une conférence animée par Philippe Trétiack et à laquelle participeront notamment Marie-Christine Labourdette, nouvelle présidente de la Cité de l’Architecture.