La MAPA d’Alfortville se modernise, l’Afrique cherche des alternatives au béton, une marina en île de france, la mode kiffe l’archi, Fallas et architecture, Le Corbusier, Khrouchtchev : du rififi à Moscou, le Quebec cherche une politique architecturale.
Du neuf avec les vieux
À Alfortville « la fusée de Tintin » ou « Goldorak », la maison d’accueil pour personnes âgées (MAPA) la plus délirante de France, va s’offrir une cure de jouvence à 2,4 M€. C’était l’œuvre de la vie du maire de l’époque, Joseph Franceschi, qui avait voulu cet « endroit de liberté », dont il disait avoir imaginé jusqu’à la « couleur des carrelages et la dimension des portes ». Néanmoins, Franceschi n’aurait jamais pu construire cette chose sans le secours de Manuel Nuñez, architecte alors en vogue. La remise aux normes incendie et la prévention des risques inondation impose d’important travaux à l’établissement de 60 lits. « Ce projet (…) “Ambitieux”, selon le maire PS Luc Carvounas, pour “un marqueur de la ville” a reçu le soutien de l’État. Une aide de 500 000 € a été débloquée par la secrétaire d’État à l’Autonomie, Pascale Boistard, qui s’ajoute à la subvention du Département (300 000 €). Le reste est financé par emprunt, à charge du groupement Les EHPAD publics du Val-de-Marne » nous apprend Le Parisien-Val de Marne. Le quotidien recueille au passage le sentiment des pensionnaires sur la vie dans la maison. Micheline Osinski déclare aimer le grand atrium, remède au sentiment de solitude. Quand au « cantou » — coin du feu en occitan — lieu de rencontre qui occupait le rez-de-chaussée, il sera déplacé à l’étage pour être à l’abri des inondations. Qui osera dire que la vieillesse fait un naufrage ?
Via Le Parisien


L’Afrique, premier continent sans béton ?
« Dans sa quête de modernité, le bâtiment africain s’est malheureusement coupé de sa tradition bioclimatique séculaire, un ensemble de savoir-faire qui a permis aux habitants d’affronter des climats parfois extrêmes. Aujourd’hui, sur le continent, les constructions sont souvent mal adaptées au climat chaud, thermiquement inconfortables et énergivores » constate Le Point Afrique. Porté par la popularité d’architectes comme Francis Kéré, David Adjaye, ou du défunt Hassan Fathy, les architectes et les ONG entament des recherches dans les matériaux de construction : terre crue, mais aussi typha, un roseau dont la structure alvéolaire présente d’intéressantes caractéristiques d’isolation et de perméabilité à l’air. « Le typha semble aujourd’hui être l’innovation la plus en vue et la plus avancée ; mais nul ne sait si elle va tenir ses promesses », explique l’article. L’enjeu est de taille : 80 % des bâtiments qui seront habités en 2050 ne sont pas encore construits.
Via Le Point Afrique



Aux diplômés d’archi, le Maroc pas reconnaissant
« Les étudiants de l’EAC (école d’architecture de Casablanca) ont fait un choix courageux et ambitieux d’étudier au sein de leur pays, dans le cadre socio-économique dans lequel ils seront amenés à travailler demain et en sont fiers. Leurs profils sont largement appréciés tant sur le marché marocain qu’international, des étudiants ont même pu joindre des cabinets internationaux d’envergure (Espagne, France, Belgique, Pays-Bas et Italie) ». Pourtant, l’association des lauréats et étudiants de l’école d’architecture de Casablanca (ALEEAC) demande en vain depuis 2004 la reconnaissance officielle du titre délivré par l’école, et le droit d’exercer le métier et le port du titre d’architecte en nom propre pour tous ses étudiants diplômés. Une situation incompréhensible, l’EAC ayant été créé par l’État marocain suite à appel à manifestation d’intérêt auprès des architectes, un cahier des charges contraignant encadrant les enseignements. L’établissement est placé sous la double tutelle du ministère de l’urbanisme et l’aménagement du territoire et du ministère de l’Enseignement supérieur. C’est ce dernier qui fait attendre l’agrément d’équivalence qui permettrait la reconnaissance de la formation déjà évaluée positivement à maintes reprises par l’ENA locale. Pas archi pressé, au ministère de l’Enseignement supérieur !
via Le Desk
Quand la mode aime l’archi
« Quand j’étais étudiant, je créais des bâtiments autour des corps, pas des vêtements. Aujourd’hui, dix ans après, j’ai encore cette obsession. Je vois parfois la silhouette comme un building sur lequel j’appose l’esthétique gothique de Bruges, ma ville natale. Cela se traduit par des lignes extrêmement verticales, allongées, qui mènent le regard vers le haut et des jeux de patronages cachés » explique Guy Martens, qui est devenu directeur artistique la marque de vêtement Y/project après des études de design intérieur. Un des nombreux exemples attestant de l’engouement pour l’architecture qui traverse actuellement le monde de la mode. «Les accessoires semblent aussi de plus en plus conçus comme des édifices. On pense à la géométrie précise des sacs et pochettes d’Hugo Matha, créés dans des matériaux souvent utilisés en construction, comme le bois ou le Plexiglas. Il y a aussi les bijoux graphiques de l’Américain Eddie Borgo, inspirés par les édifices modernistes, ou les mallettes de Young Jin Jang, influencées par la fonctionnalité des immeubles coréens» explique le magazine Grazia. L’architecture sert à la fois de modèle et d’écrin « Une silhouette doit désormais évoluer dans un contexte. Elle sera d’autant plus instagrammée. Un styliste ne pense plus seulement à une jupe ou un haut, mais à un look, à la fille qui va l’incarner et où elle va le faire. […] Nicolas Ghesquière, féru d’architecture, présente depuis deux ans la ligne Croisière de Louis Vuitton dans des édifices emblématiques». Quels sont les architectures les plus en vogue, et pourquoi ? «Les lieux donnent des références subconscientes, qu’il s’agisse d’espaces urbains connus du type Niemeyer, ou de monuments célèbres comme l’abbaye de Westminster, où Gucci a présenté son défilé croisière 2017″, précise Serge Carreira. Comme les lieux de shows, les boutiques doivent refléter avec précision la vision du créateur». Pour paraphraser le designer Raymond Loewy : l’architecture fait vendre.
via Grazia

Une politique architecturale pour le Québec
Pendant que les fashionistas tentent d’épuiser les icônes de l’architecture, Nathalie Dion, présidente de l’Ordre des architectes du Québec, cherche à doter la belle province d’une politique architecturale cohérente. Les citoyens de treize villes québécoises vont être consultés pour expliquer en quoi l’architecture influence leur vie quotidienne, dire ce qui leur plaît dans les édifices et lieux publics qu’ils fréquentent, et donner leurs idées sur la sauvegarde du patrimoine. Les informations recueillies permettraient « de doter l’État d’une vision commune de l’architecture […], d’harmoniser les règles, les règlements, ce qui ferait en sorte que les bâtiments répondraient durablement aux défis d’aujourd’hui et de demain. On peut parler des changements climatiques, du vieillissement de la population, de la cohésion des communautés et de la préservation du patrimoine » a déclaré Nathalie Dion,, non sans préciser qu’un tel projet « ne pouvait pas se réaliser en criant “lapin” ». Pas plus qu’en criant « chameau », l’animal totem symbole des malfaçons architecturales.
via L’Actualité
Un nouveau havre pour les navigateurs du Grand Paris
Un port de plaisance : voilà sans aucun doute un équipement dont la région parisienne est insuffisamment dotée. Une carence cruelle que Cormeilles-en-Parisis entend combler, avec la construction d’une marina de 150 à 200 anneaux et 1200 logements. « Depuis que le cimentier Lafarge a trouvé un accord avec Bouygues Immobilier pour la vente de son terrain de 22 ha sur les berges de Seine, les choses “avancent plus vite que prévu”, selon le maire (LR), Yannick Boëdec, qui prévoit […] l’arrivée des premiers habitants pour 2 022 ». Le maire de la commune voisine de Sartrouville est emballé, celui de La Frette, autre commune limitrophe, « ne voit pas le projet d’un mauvais œil ». Un architecte compétent en la matière est déjà au travail « il s’agit de Xavier Bohl, qui a déjà imaginé Port Grimaud et Port Fréjus, dans le Var, ou encore Port Chiberta, à Anglet, dans les Pyrénées-Atlantiques. À en croire le premier visuel dévoilé par Yannick Boëdec sur sa page Facebook, Port Cormeilles ressemblera à s’y méprendre à Port Cergy, la première marina construite en Île-de-France. “Ce sera différent, nuance l’édile. Car le bassin qui accueillera les bateaux ne sera pas dépendant des variations du niveau de la Seine.”». Il ne reste plus qu’à construire une mer digne de ce nom pour baigner ces deux ports de légende.
Via Le Parisien

L’architecture mise à nue par ses bûcherons, même
Depuis Twin Falls, Idaho, Liyah Babayan, gérante de l’Oh La La boutique, témoigne « vous retournez dans la rue, et là c’est un genre de choc au départ quand vous réalisez qu’il manque quelque chose. Et vous réalisez que ce sont les arbres », qui bordaient la route, et que la ville a fait couper pour le plus grand mécontentement de certains clients fréquentant les commerces du lieu. Mais il y a plus grave « sans les arbres, les gens ont commencé à remarquer combien la ville était ancienne (c’est à dire que certains de ses bâtiments ont été construits vers 1900, NDLR), et qu’elle aurait besoin de quelques réparations ». Sans les arbres, remarquent d’autres, l’architecture est complètement exposée, pour le pire et le meilleur : «ce sont de magnifiques bâtiments, s’enthousiasme un commerçant, ils ont de la personnalité, une histoire… ». Les premiers ravalements sont envisagés pour leur redonner leur lustre d’antan et leur valeur d’aujourd’hui. À Twin Falls, c’est donc bien l’arbre qui cachait la forêt d’édifices.
via KMVT
Un Gabon sans foncier ?
«Si nous n’y prenons garde, il n’y aura plus de foncier pour l’Etat gabonais avant la fin du siècle, peut-être même avant. Parce que tel que c’est parti avec la multiplication des SCI et de projets parfois mal conçus, l’État est en train de perdre le foncier» a avertit le vice-premier ministre du Gabon Bruno Ben Moubamba. Pour parer à cette éventualité, l’administration centrale gabonaise met sur pied «un nouvel ordre urbanistique» et enjoint ses agents à « proposer des esquisses de planification de vos villes, en projetant des réserves foncières qui seront transformées en déclaration d’utilité publique, afin de sécuriser le foncier». Une initiative bien perçue par les directeurs provinciaux de l’urbanisme « pour faire face à l’anarchie foncière, ils ont promis faire œuvre pédagogique en sensibilisant les acteurs des collectivités locales qui, parfois font primer le droit coutumier sur le droit légal».
Via Gabon Review
Deux auxerrois architectes et falleros
Étrange destin qui a conduit Romain Viault et Xavier Laumain, deux architectes auxerrois à construire une falla, un monument de carton-pâte exposé dans les rues de Valence (Espagne) durant la fête des Fallas. Baptisée Postnatura, leur falla « nous projette dans un avenir incertain, où l’Homme n’a pas su préserver son environnement. L’arbre, souvenir de cette Nature disparue, est devenu un produit industrialisé, mercantile, et prêt-à-monter », explique Romain Viault. Figure centrale, l’arbre est fait d’un enchevêtrement de Y atteignant six mètres de hauteur. « Le “Y” n’a pas été choisi par hasard. En anglais, cette lettre se prononce comme “why”, qui signifie pourquoi. Un effet sémantique recherché par le duo d’architectes. “Cette sculpture invite à s’interroger sur le pourquoi de la dégradation de l’environnement”». Why alors, brûler ce monument et les 760 autres montés dans la ville au terme de quatre jours de festivité ? Le bilan carbone va-t-il condamner cette tradition, inscrite au patrimoine immatériel de l’UNESCO depuis 2016 ?
via L’Yonne

A l’ombre du Corbu en pleurs
« Le moins que l’on puisse dire, c’est que Moscou est une ville au patrimoine urbain très chahuté », relève Antoine Picon, président de la fondation Le Corbusier. Picon et la fondation s’inquiètent du projet d’immeubles de 58 mètres qui risque de bientôt faire de l’ombre au Centrosoyouz, seul œuvre de Le Corbusier en Russie. « Si ce projet venait à être réalisé, il aurait pour conséquence de modifier de manière extrêmement dommageable l’environnement immédiat du Centrosoyouz dont la composition avait pris en considération l’ensemble des bâtiments existants à l’époque », a plaidé Picon dans une lettre adressée au maire de Moscou et au ministre de la Culture de Russie. Les experts jugeant, dans un style tout soviétique, les voisins du Centrosoyouz « moralement et physiquement dépassés », il y a de fortes chances de les voir disparaître. Classé monument historique, l’immeuble du Corbu est protégé des destructions, mais devra s’accommoder de ces mutations contextuelles.
via Le Parisien
Moscou : de Khrouchtchev Vladimir fait table rase
Les vicissitudes du Centrosoyouz ne sont que moindre mal si l’on songe au sort qui attend 8 000 immeubles construits dans la capitale russe durant l’ère Khrouchtchev, des édifices de logements préfabriqués aussi surnommés « cinq étages » abritant 10 % de la population moscovite. Le maître du Kremlin vient d’ordonner leur démolition-reconstruction pour un coup représentant deux fois le budget annuel de la ville, soit 67 milliards d’euros, sans que l’on sache vraiment comment sera financée ce que le journal suisse Le Temps qualifie de «démolition du siècle». La plupart des habitants sont devenus propriétaires des logements durant les années 90. Certains occupants de ces « cinq étages » réputés pour leur médiocre qualité constructive se réjouissent « C’est un peu la honte d’habiter dans ce taudis. Les murs sont affreux, les canalisations sont pourries, il y a sans arrêt des problèmes d’odeur et d’infiltrations venant du toit ». D’autres craignent la relégation au-delà du périphérique local — très loin du centre — quand ils ne flairent pas l’entourloupe pure et simple «j’ai sué sang et eau pendant une année entière à tout refaire. Nous avons pu racheter l’appartement voisin et nous avons maintenant un bel appartement de 100 m2. Et maintenant, on veut nous caser dans une cage à lapin et qui sait dans quelles conditions ? On entend un tas d’histoires de logements neufs construits par l’État où on vous donne les clés d’un appartement aux murs en béton nu et sans plancher !». Propriétaires de tous les pays, contre ce nouveau genre de logement fruit des noces baroques de l’autoritarisme post soviétique avec le capitalisme le plus débridé, unissez-vous !
via Le Temps

Olivier Namias