Plaidoyer pour l’ordinaire : 35 logements par l’agence Atelier Martel à Homécourt

Le plan, outil de projet et de lecture universelle, est inséparable de la production de l’architecte. Architectures CREE publie des carnets de plans dans ses numéros. Chaque semaine, la rédaction a décidé de compléter sa rubrique en vous faisant découvrir ou redécouvrir l’ensemble des plans d’un même et unique projet. 

L’opération de 35 logements à Homécourt livrée par l’agence Atelier Martel pour le compte de Meurthe & Moselle Habitat dessine un hameau d’habitations étroites et longitudinales, aux hauteurs variables sur deux ou quatre niveaux.

 

« A Homécourt, commune de Meurthe-et-Moselle de 6 000 habitants, l’activité minière en déclin a laissé place aux traditionnelles zones d’activités, un tissu discontinu qui constitue le plus souvent la dernière frange urbaine avant la forêt ou les exploitations agricoles. C’est dans ce contexte que s’implante l’opération de logements de Meurthe & Moselle Habitat, dans un morceau de ville sans tissu ni identité, grignoté sur la forêt fraîchement déboisée. Le nouveau quartier dit « Bois de la Sarre » accueille là sa première opération significative : un îlot combinant 19 maisons individuelles et 16 appartements en collectif, dont la compacité contraste avec la faible densité des constructions alentour. Pour l’inscrire dans son environnement, les architectes Stéphane Cachat, Marc Chassin et Laurent Noël de l’agence Atelier Martel puisent leur « imaginaire dans des formes connues et familières, archétypes de l’architecture périurbaine », disent-ils : implantation en bande, maisons accolées, jardins privatifs, façades en enduit, toits double pente en zinc. Une « banalité apparente » qui compose avec le déjà-là, et faciliterait les mécanismes d’appropriation des habitants… »_Amélie Luquain

Retrouvez l’intégralité du reportage dans le numéro 384 sur le thème « hospitalité », en vente sur notre shop

© Atelier Martel

 

Best of 2017 : Bureaux et santé

Best of 2017 : Bureaux et santé

La revue Architectures CREE revient sur les constructions qui ont marqué l’année. Programme par programme, elle a sélectionné pour vous des réalisations qui ont émergé du paysage français, et vous en propose la relecture. Ci-dessous, notre best of 2017 dédiés aux édifices de bureaux et de santé. 

Brenac & Gonzalez : des façades à l’effet cinétique 1/3

L’agence Brenac & Gonzalez & Associés a livré trois édifices tertiaires qui se distinguent par leur peau miroitante et prismatique, à l’effet cinétique. Le premier d’entre-eux est constitué de caissons vitrés. La nouvelle façade vient envelopper le bâtiment tel un « manteau prismatique aux reflets mouvants et cristallins, scintillant au soleil » déclarent les architectes. Le second alterne bandeaux vitrées et résille constituée de tubes d’aluminium. Le troisième s’habille de prismes d’aluminium.

 

Centre de Recherche EDF à Saclay, ou de l’usage du cylindre

Francis Soler emprunte la figure du cylindre comme réponse au territoire plat et vide de Saclay, à la diversité de la programmation digérée dans un tout homogène, et à la nécessaire flexibilité. S’en suit un assemblage semblable aux rouages d’un mécanisme horloger, structurés de quatre pôles fonctionnels majeurs. Le cylindre devient le dénominateur commun, volume capable s’imposant comme un contenant, servi par une écriture identique. Un centre de recherche Saclay 1.0 aux règles sauvages qu’on ne retrouvera pas dans des projets futurs, quid de celui de l’agence LAN pour la construction d’une résidence étudiante face à l’école Centrale. Un cas d’école ?

 

Campus EDF à Saclay : empilement sur un plateau

« Au vu du territoire disponible, un tel programme aurait pu être morcelé » soulignent les architectes de l’agence ECDM. Mais c’est le concept inverse qui a été mis en œuvre, défendant l’idée d’un bâtiment unitaire, mixte et dense, à la consommation de terres arables. « Nous préférons l’empilement et la compacité à une nappe horizontale étendue » continuent-ils. Ainsi, la totalité du terrain disponible n’est pas phagocyté par l’architecture qui met en scène sa stratégie d’empilement. Le bâtiment principal laisse transparaitre en façade le programme qui s’étage en trois couches superposées ; matérialité des revêtements et motifs générés par le rythme des percements en constituent les signes distinctifs.

 

Béton empathique pour une maison d’accueil spécialisée

Ici, l’architecture de l’Atelier Martel est au centre du dispositif de soin. Suscités par une multitude de causes, les troubles épileptiques peuvent être déclenchés par une large série de facteurs, qui vont du claquement brutal d’une porte, à des conditions de lumières changeantes, au stress ou autre. L’architecture intérieure donne la priorité au lisse, à l’intégré, au mou. 100 m2 de tissés bicolores ont été réalisés par l’artiste Mayanna von Ledebur, d’après une photographie de nuages prise à la verticale du site. Elle s’est aussi chargée de la création du motif de creux appliqué sur les parois béton. À Dommartin-lès-Touls, on aurait vu les gens caresser le béton. La réconciliation du public avec le plus mal aimé des matériaux de construction serait-elle en marche ?

 

3 plans sur : Le Navire à quai de Brenac et Gonzalez

Paris 13e, s’installent un centre d’accueil de jour pour personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et une résidence pour personnes âgées de 62 lits avec jardin dédié. L’ensemble immobilier, conçu par l’agence Brenac et Gonzalez, affirme sa présence dans un quartier hétéroclite par un socle massif, qui s’étage en jardins suspendus jusqu’à former une arrête vive. La texture façon Corten de son béton le rattache à la brique des constructions alentour. Xavier Gonzalez compare volontiers cette figure de proue à un « navire rouillé immobile et définitivement à quai, possible métaphore de la vieillesse ». Triste image pour saluer la « naissance » de ce beau bâtiment.

 

La rédaction d’Architectures CREE

 

 

Best of 2017 : Logements

Best of 2017 : Logements

La revue Architectures CREE revient sur les constructions qui ont marqué l’année. Programme par programme, elle a sélectionné pour vous des réalisations qui ont émergé du paysage français, et vous en propose la relecture. Ci-dessous, notre best of 2017 de logements. 

 

80 logements à Cesson, ou la revitalisation d’un centre-bourg par MDNH

En France, les bourgs se vident et paradoxalement dévorent les terres agricoles. D’un côté, les centres métropolitains accaparent les activités économiques et sociales. De l’autre, les pavillons prisés par la classe moyenne colonisent depuis les années 1970 la périphérie des petites villes. Afin de redynamiser l’économie des milieux ruraux et périurbains et d’accompagner la transition écologique des territoires en limitant l’étalement urbain, ont lieu aujourd’hui des opérations de revitalisation et de densification des parcelles en centre-bourg. C’est dans ce contexte que s’inscrivent, à Cesson (77), une commune de 10 000 habitants, 80 logements de taille intermédiaire construits par MDNH Architectes. Des constructions qui convoquent la figure de la maison, en reprenant les toitures à deux pans ; réminiscence d’un passé de bourgade, comme si elles seules pouvaient emporter l’adhésion de tous.

 

 

35 logements à Homécourt (54) : un plaidoyer « ordinaire » de l’atelier Martel

Autre petite commune, de quelques 6 000 habitants, celle d’Homécourt, en Meurthe-et-Moselle. L’activité minière en déclin a laissé place aux traditionnelles zones d’activités : un tissu discontinu qui constitue le plus souvent la dernière frange urbaine avant la forêt ou les exploitations agricoles. Un îlot compact combinant 19 maisons individuelles et 16 appartements en collectif, contraste avec la faible densité des constructions alentours. Pour l’inscrire dans son environnement, les architectes Stéphane Cachat, Marc Chassin et Laurent Noel de l’atelier Martel puisent leur « imaginaire dans des formes connues et familières, archétypes de l’architecture périurbaine », disent-ils : implantation en bande, maisons accolées, jardins privatifs, façades en enduit, toits double pente en zinc. Une « banalité apparente » qui compose avec le déjà là, et faciliterait les mécanismes d’appropriation des habitants.

 

Pari(s) 2072 : Naud & Poux applique sa théorie « durable » boulevard Davout

« Pari(s) 2072 se projette dans un monde où un bâtiment construit en 2012 continuera à rendre de bons et loyaux services en 2072 » introduisent les architectes, Elizabeth Naud et Luc Poux. Ils proposent un travail sur la résilience, prenant le contrepied de l’obsolescence programmée des constructions depuis les années 1950. Alors que pendant des siècles, selon eux, la ville s’est reconstruite sur elle-même par superposition, stratification, adjonction, greffe, empilement, etc, ces constructions auraient manqué de vues prospectives. Dans le cadre d’une requalification territoriale, et plus précisément d’une opération de re-logement, le projet consiste à construire 68 nouveaux logements boulevard Davout (paris 20e), avant de démolir des barres vétustes et énergivores. Epannelage des toitures, plan en Svastika, circulations pénétrantes, réserve foncière en surélévation, évolutivité des logements, pièce en plus : autant de propositions destinées à servir la résilience.

 

Les logements de Berranger Vincent à EuroNantes

Nouvelle silhouette dans la skyline nantaise, une construction de l’agence Berranger Vincent de 53 m de hauteur (limite IGH oblige) s’attache au tissu hétérogène. Courante dans ce contexte déjà pourvu de « tours » des années 70, ses atours modernistes sont revisités par des biais et des matériaux contemporains ; une façon de la rendre plus attractive et moins sévère. Les 69 logements en accession qu’elle abrite sont complétés d’un immeuble de 13 logements sociaux le long de l’avenue et de 5 maisons individuelles groupées en balcon sur le fleuve.Une mixité qui interroge; car limitée par bloc d’habitation quand elle aurait pu être exercée au sein d’un même immeuble. De plus, cette construction entre largement dans le débat sur la tour européenne contemporaine, une typologie mise à mal par les échecs supposés ou réels des constructions léguées par le mouvement moderne.

 

Soler et Ricciotti : le nouveau Haussmannien ?

Bien que le 16e arrondissement n’en est pas à son premier essai dans l’exercice de son sport favori antisocial, le bailleur social Paris Habitat et les architectes Soler et Ricciotti dresse les deux premiers immeubles de logements sociaux d’un îlot de quatre bâtiments. Les architectes proposent une volumétrie qu’ils disent inspirée de l’esthétique et du « bon sens » haussmannien, reprenant « des gabarits haussmanniens avec des matériaux contemporains », précise l’architecte, qui va jusqu’à se poser en avant-gardiste. Un haussmannien qui prend quelques libertés vis-à-vis de son modèle en s’affranchissant notamment de l’alignement, de la continuité sur rue et de la hauteur.

 

La rédaction d’Architectures CREE

 

35 logements à Homécourt (54) : un plaidoyer « ordinaire » de l’atelier Martel

Pour mieux asseoir une construction de logements intermédiaires ex-nihilo, l’atelier Martel puise ses références dans l’histoire du territoire, renvoyant aux archétypes et aux composantes locales.

A Homécourt, commune de Meurthe-et-Moselle de 6 000 habitants, l’activité minière en déclin a laissé place aux traditionnelles zones d’activités : un tissu discontinu qui constitue le plus souvent la dernière frange urbaine avant la forêt ou les exploitations agricoles. C’est dans ce contexte que s’implante l’opération de logements de Meurthe & Moselle Habitat, dans un morceau de ville sans tissu ni identité, grignoté sur la forêt fraichement déboisée. Le nouveau quartier dit « Bois de la Sarre » accueille là sa première opération significative : un îlot combinant 19 maisons individuelles et 16 appartements en collectif, dont la compacité contraste avec la faible densité des constructions alentours. Pour l’inscrire dans son environnement, les architectes Stéphane Cachat, Marc Chassin et Laurent Noel de l’atelier Martel puisent leur « imaginaire dans des formes connues et familières, archétypes de l’architecture périurbaine », disent-ils : implantation en bande, maisons accolées, jardins privatifs, façades en enduit, toits double pente en zinc. Une « banalité apparente » qui compose avec le déjà là, et faciliterait les mécanismes d’appropriation des habitants.

Rationalisation

La composition urbaine hérite elle-même de l’histoire ouvrière de la ville, mais aussi des principes de l’urbanisme Moderne, selon les architectes. Elle s’établit en bandes, perpendiculaires à l’axe viaire principal du quartier, alternant des pleins et des vides. Chaque bande construite comprend cinq maisons avec garage attenant, et un petit immeuble collectif de quatre logements en R+3. Cette trame, associée à des plans de logement longs et étroits de 15,50 x 3,60 m – des dimensions proches de celles des cités radieuses de le Corbusier – optimise les orientations est ouest, et dessine des petites façades orientées au sud, qui peuvent être presque entièrement vitrées. L’unité de base des habitations permet d’accueillir l’ensemble des typologies individuelles et collectives, du T2 au T5, tout en dégageant des doubles hauteurs dans les séjours où les doubles baies s’ouvrent sur les jardins au sud. Ainsi, la petite surface de façade à l’ouverture surdimensionnée caractérise les ambiances intérieures.

 

Encadrement

Un projet dense, compact, dont la trame rationalisée et les volumes simples et répétitifs répondent à un budget serré d’environ 1200€/m2, et permettent en contrepartie d’investir dans des matériaux et des détails soignés qui anoblissent l’ensemble.

Une construction qui s’inspire, là encore, des façades traditionnelles de la commune d’Homécourt, dotées de fenêtres encadrées par de la pierre en légère saillie, expliquent les architectes. Cette tradition constructive est liée à la proximité des carrières de pierre et à la mise en œuvre qu’elle implique dans le percement des baies. Le projet revisite ce patrimoine en développant avec l’entreprise Compobaie des cadres en béton fibré préfabriqué. Assemblé en usine, le bloc-fenêtre incorpore l’ensemble des menuiseries, l’occultation en volet roulant, et parfois le garde-corps ajouré en béton blanc. Ce dernier constitue un claustra, laissant filtrer la lumière et préservant l’intimité de la « pièce » extérieure, tout en affichant un motif ornemental qui n’est pas sans rappeler celui de la Cité Radieuse de Briey édifiée par le Corbusier en 1961 à seulement quelques kilomètres de là. L’atelier Martel se place là dans une recherche qui s’apparente au concept de l’architecture analogue développé par Miroslav Sik, défenseur indocile d’une architecture de l’ordinaire, infligeant un désaveu total à l’architecture vedette et au « solitaire architectonique ».

 

 

Amélie Luquain H.

 

Maîtrise d’ouvrage : Meurthe & Moselle Habitat Maîtrise d’œuvre : Atelier Martel (Stéphane Cachat, Marc Chassin et Laurent Noel) BET Egis Bâtiments Grand Est Localisation : Homécourt (54) Programme : 35 logements dont 19 maisons individuelles groupées et 16 appartements en logements collectifs.  Surface (SHAB) : 2.745 m2, sur une parcelle de 7000 m2 Coût des travaux (HT) : 3,8 M€ Calendrier : études 2013-2014, chantier 2015-2016.

 

Courtesy Atelier Martel / Yohan Zerdoun | Architectural Photography