La Chapelle de Ronchamp : un classique signé Le Corbusier !

Projet emblématique de l’architecte moderne Le Corbusier, la Chapelle de Ronchamp s’inscrit dans le paysage depuis 1955. Comme beaucoup de chapelle, celle de Ronchamp s’inscrit sur une ancienne construction présente depuis des siècles. Après un temple romain,  dont la datation reste très floue, une petite chapelle est construite au Moyen Âge. Au début du XXe siècle, un incendie la réduit en cendres. Elle est reconstruite, mais à nouveau, elle sera détruite par l’armée allemande durant la seconde guerre mondiale.

 

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© Gili Merin

 

Une fois la paix retrouvée, le diocèse de Besançon fait appel à l’architecte franco-suisse Le Corbusier pour que les habitants du village de Ronchamp ne soient plus privés de lieu de culte . Plutôt habitué des grands ensemble de la reconstruction avec son unité d’habitation, il accepte finalement de travailler sur ce premier projet culturel. Les travaux démarrent en 1954 et se termine un an plus tard. Sur cette même colline, le Corbusier dessinera également en abri pour pèlerin, la maison du chapelain, et une « pyramide de la paix ».

 

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© Gili Merin
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© Gili Merin

 

Avec un architecte pionnier du mouvement moderne, la chapelle de Ronchamp ne pouvait que s’inscrire dans cette architecture emblématique du XXe siècle. Pourtant, l’architecture de la Chapelle se trouve loin des murs orthogonaux revendiqués par Le Corbusier. Il s’inspire de la vallée des Vosges et crée des parois, des tours, et un toit aux formes courbes. Il dessine également un espace de célébration en plein air, qui matérialise encore plus cette communion avec la nature.

 

Les différents volumes, dont la structure est faite de béton, s’articulent autour de l’espace de culte. Les murs, dont l’ossature est remplie de pierres de récupération, sont d’un béton projeté recouvert de chaux blanche. L’intérieur est également peint d’un blanc immaculé, favorisant le recueillement. Bien que de forme très organique et peu orthogonal, la toiture de la chapelle est un grand voile de béton, réalisé à partir d’un coffrage en bois, dont les marques des banches ont été laissées apparentes ! Elle repose uniquement sur les murs en béton.

 

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© Gili Merin
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© Gili Merin
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© Gili Merin

 

Dans ce lieu de culte, symbole de l’architecture sacrée moderne, le Corbusier travaille tout particulièrement la lumière. Réelle matière à projet, elle est parfois diffuse, comme à travers les vitraux coloré, également dessinés par l’architecte – ou plus directe, créant des espaces d’ombres, comme à l’extérieur du bâtiment. Aujourd’hui, la chapelle Ronchamp bénéficie du label « Patrimoine du XXe siècle » depuis 1999. Elle est également classée au monument historique depuis 1967. En 2011, le site corbuséen est complété par la construction d’une poterie et d’un couvent, réalisée par l’architecte italient Renzo Piano.

Sur les traces du Corbusier : 4 réalisations de l’architecte à voir et revoir à Paris

 

Les beaux jours arrivent doucement. C’est une belle occasion pour découvrir ou re-découvrir le patrimoine architectural qui s’est installé dans les rues parisiennes. Après vous avoir fait redécouvrir le Corbusier, et ses nombreuses facettes, nous vous proposons de découvrir ses réalisations dans la capitale. Ses œuvres sont internationales, mais vous n’avez guère besoin d’aller à l’autre bout du monde ou de la France pour observer ses réalisations. Voilà cinq de ses œuvres que vous pouvez visitez à Paris.

 

La Maison la Roche – 1925, Paris

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Maisons La Roche-Jeanneret, Paris
Photo : Olivier Martin Gambier 2016 © FLC/ADAGP
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Maisons La Roche © FLC/ADAGP

Raoul La Roche était un mordu d’art, et fervent collectionneur. Il demande à Le Corbusier d’imaginer une résidence qui lui permettrait à la fois d’exposer ses collections, tout en y habitant confortablement. L’architecte instaure alors une véritable promenade architecturale. C’est cette particularité de commande qui rend la réalisation hors-norme, d’autant plus que Le Corbusier y applique les 5 points d’une architecture moderne, tout en utilisant le béton armé, matériau nouveau à l’époque. Dans les années 1930, de nombreux artistes, architectes, et autres aficionados d’arts viennent visiter le bâtiment… et les tableaux de Raoul La Roche. Aujourd’hui, c’est ici que la Fondation Le Corbusier a établi ses quartiers. La Maison la Roche se visite, tandis que les bureaux de la fondation sont situés juste à côté, dans la Maison Jeanneret, ainsi que la bibliothèque regroupant les archives laissées soigneusement par l’architecte lui même.

 

La Maison-atelier du peintre Amédée – 1922, Paris

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Photo : Olivier Martin-Gambier 2006 © FLC/ADAGP

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Situé dans le 14e arrondissement de Paris, la maison-atelier est la première réalisation du Corbusier dans la capitale, en 1922. Il conçoit cette habitation pour son ami peintre-dessinateur Amédée Ozenfant. A l’origine, le rez-de-chaussé était occupé par le garage. Aujourd’hui, les ouvertures en fenêtres-bandeaux ont été modifiées. Le premier étage est l’habitation, alors que le second est entièrement dédié à un vaste atelier d’artiste, baigné de lumière par de grandes baies vitrées et de grands volumes, qui n’attendait qu’à être exploité par le peintre. Même si l’intérieur n’est pas visitable, vous pourrez admirer le bâtiment de l’extérieur, et relevé les différentes caractéristiques de l’architecture moderne.

 

L’unité d’habitation et sa cellule,  Cité de l’architecture et du patrimoine

unité_habitation_marseille_cité_radieuse_logement_le_corbusier_architecture_moderneSi vous souhaitez vous immerger dans les logements sociaux créer dans les unités d’habitations que le Corbusier créait à Marseille, Berlin, Firminy près de Saint-Etienne, Rezé près de Nantes et Briey-en-Forêt en Meurthe et Moselle, rendez-vous… à la cité de l’architecture et du patrimoine de Paris. En effet, vous y trouverez une reproduction grandeur nature d’une cellule d’habitation, avec le mobilier d’époque. Les deux guerres vécues par le Corbusier marque son esprit, et font grandir en lui l’envie de reconstruire le pays, en produisant des logements de masse. Il y appliquera sa pensée théorique, y appliquera le Modulor… Aujourd’hui, ces logements sont toujours habités et font partie d’un patrimoine riche à conserver !

 

La villa Savoye – 1931, Poissy

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Villa Savoye, Poissy
Photo : Paul kozlowski © FLC/ADAGP
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Villa Savoye, Poissy
Photo : Paul kozlowski © FLC/ADAGP

Pour finir, en s’éloignant quelques peu de Paris, vous pourrez visiter la Villa Savoye, véritable manifeste de l’architecte et du mouvement moderne. Cette réalisation, située dans la ville de Poissy, reprend de manière rigoureuse les 5 piliers d’une architecture moderne préconisée par l’architecte : le rez de chaussé est dégagé grâce à des pilotis, les fenêtres-bandeaux structurent des vues sur l’extérieur, le plan libre permet de dresser une façade libre de toute contrainte et le toit-terrasse crée un espace supplémentaire. Conçu en 1931 pour de riches propriétaires, la villa est classée Monument Historique depuis 1965, et Patrimoine Mondial depuis 2016.

 

Anne Vanrapenbusch

Le Corbusier, un architecte, mais pas que !

Le Corbusier, un architecte, mais pas que !

 

Charles-Édouard Jeanneret-Gris voit le jour le 6 octobre 1887, en Suisse. Ce n’est qu’en 1920 qu’il se fera appeler par son pseudonyme : Le Corbusier. Figure du mouvement moderne, c’est un homme à multiples casquettes. Bien connu pour ses réalisations architecturales et ses réflexions sur l’urbanisme, Le Corbusier exerçait aussi dans de nombreux autres domaines tels que l’art de la sculpture, la peinture, les lettres, le graphisme… Ses diverses expériences ont nourri son travail d’architecte tout au long de sa vie.

 

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Le Corbusier devant la maquette de la Ville radieuse
Photo : The New-York Times © FLC/ADAGP

 

Jeune, il étudie la gravure et intègre l’Ecole d’Art de La Chaux-de-Fonds en Suisse, dans la section Décoration. Il s’intéresse ensuite à l’architecture. C’est en parcourant le monde que le jeune diplômé va s’inspirer et construire son bagage architecturale. « L’architecture se découvre en marchant. », disait-il. De 1907 à 1911, et encore bien après, ses voyages et ses rencontres lui permettent d’observer, d’analyser, de comprendre le monde qui l’entoure.

 

Symbole de l’architecture moderne

Il installe son cabinet d’architecture à Paris dès 1917. Parmi ses plus grandes réalisations – qui sont tout de même au nombre de 78, et plus de 400 projets –  on retrouve des figures du logement collectif et individuel, et de la culture. Les unités d’habitation, les nombreuses « villas blanches » qu’il dessine, dont la plus connue est la Villa Savoye. Celle ci est le manifeste d’une architecture moderne, que le Corbusier définit en 5 points : pilotis, fenêtre-bandeau, façade libre, plan libre et toit-terrasse. Depuis 2016, 17 réalisation ont été reconnues « patrimoine mondial de l’UNESCO » : les bâtiments du Capitale de Chandigarh en Inde, le Cabanon de RoqueBrune-Cap-Martin, la Cité Frugès à Pessac, le couvent Sainte-Marie de la Tourette, l’immeuble Porte Molitor, la maison de la culture de Firminy, la maison du Docteur Curutchet, la Maison Guiette en Belgique, la Manufcature de l’usine Duval, Le musée d’art occidental à Tokyo, la Villa « le lac » en suisse, ainsi que la célèbre Villa Savoye.

 

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La chapelle de Ronchamp, 1955
Photo : Cemal Emden 2015 © ADAGP

 

L’art-chitecte moderne

Le Corbusier ne consacre pourtant pas tout son temps à l’architecture. Chaque jour, de 8h à 13h, il se consacre à la création, à la peinture, la sculpture, les collages. Une « pause artistique » dans son activité d’architecte, qu’il considère comme nécessaire. Il dessine énormément durant ses voyages, constituant une véritable collection de carnets de croquis. Il est à l’origine de nombreuses statues, notamment en bois, qu’il peint parfois : bleu, jaune, rouge, vert, ses couleurs de prédilections, qu’on retrouve d’ailleurs dans certaines œuvres architecturales ou encore dans ces peintures.

 

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Trois figures « Bado », 1943
© FLC/ADAGP

Composer pour instaurer l’ordre

Homme de rigueur et rationnel, le Corbusier invente une unité de mesure qu’il nomme Le Modulor. Basé sur le nombre d’or et les proportions humaines, il défini les mesures de son architecture : la hauteur des plafonds, la largueur et hauteur d’une chaise, la largeur d’un couloir… Bon nombre de ses réalisations sont basées sur ce rapport : le couvent de la Tourette, les unités d’habitation… L’architecte utilise également le Modulor dans la réalisation d’affiches, ou pour ces peintures. Il met en place des tracés régulateurs, qui lui permette d’ordonner ses compositions, de fixer la géométrie de l’ouvrage de manière non-arbitraire.

 

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© FLC/ADAGP

 

L’écriture au service de ses idées

De part son grand travail théorique, le Corbusier est un « homme de lettre ». C’est d’ailleurs cette profession qu’il fera figurer sur sa carte d’identité française, lors de sa naturalisation en 1930. Il a conscience que la diffusion de ses idées doit également passer par l’écrit, et il réalise plus de 40 ouvrages. Une véritable fièvre éditoriale entraîne le Corbusier à publier aussi bien dans des revues, comme L’Esprit Nouveau, qu’il crée avec son ami Amédée Ozenfant en 1920, ou dans des recueils théoriques, comme « Vers une architecture« , qu’il publie en 1923.

 

La pratique de ce fameux architecture du XXe siècle, monument du mouvement moderne est finalement très hétéroclite. Comme il le disait, « Tapisseries, dessins, tableaux, sculptures, livres, maisons et plans de villes ne sont, en ce qui me concerne personnellement, qu’une seule et même manifestation d’une harmonie stimulante au sein d’une nouvelle société machiniste »

 

Anne Vanrapenbusch

3/7 : Vous avez dit Brutalisme ? Une question de définition

Cette semaine, Architectures CREE se penche sur le brutalisme, succès architectural de la décennie. Après avoir présenté les différents indices témoignant d’une véritable brutalmania, nous revenons sur la définition du brutalisme par les historiens et théoriciens de l’architecture. Est-ce un style? Un mouvement? Ou encore autre chose?

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Simon Phipps: University of East Anglia, Library, Norwich, 1962–68, architect: Denys Lasdun © Simon Phipps, Courtesy Museum im Bellpark
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Simon Phipps: Apollo Pavillion, Peterlee, 1969, architect: Victor Pasmore © Simon Phipps, Courtesy Museum im Bellpark

Une première explication au succès du Brutalisme tient à un paradoxe : la définition très vague du terme. Bien qu’il dispose d’un suffixe en — isme qui lui donne sa place dans les classifications d’histoire de l’art, le mot Brutalisme ne désigne pas un mouvement précis. Pas de figures ou d’animateurs éditant une doctrine applicable, pas de foyer unique pour ce qui apparaît comme un mouvement global, s’étendant de part et d’autre du rideau de fer, dans les pays occidentaux aussi bien que chez leurs anciennes possessions récemment décolonisées. Pas de bornes temporelles réelles, hormis un point de départ fixé au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, et se prolongerait jusqu’à aujourd’hui. Certains architectes dont la production est qualifiée de Brutaliste rejettent le qualificatif avec vigueur.

Un symposium international tenu à Berlin en mai 2012 a permis d’élucider quelques points de doctrine (1). L’historiographie a longtemps attribué l’origine du terme aux architectes Peter et Alison Smithson d’abord, puis au critique Reyner Banham, dans l’Angleterre des années 50. Les premiers l’auraient utilisé pour qualifier leur école de Hunstanton, le second dans un article paru dans Architectural Review en 1955 (2) en y accolant le terme « New », puis dans un ouvrage publié en 1966 (édition française en 1970) (3), depuis longtemps épuisé. Il est aussi admis que Le Corbusier a indirectement sa part dans la formation du terme. L’architecte parla de béton brut à propos de la Cité radieuse de Marseille, en raison des imperfections constructives dont eu à souffrir la « maison du fada ». Bien que brut se traduise en anglais par raw, terme qui renvoie au cru, la racine du français à prévalu.

Cette généalogie largement admise présente peut-être une version simplifiée des faits. Lors de son intervention au symposium de Berlin, Liane Lefaivre rappelle les origines suédoises du terme Nybrutalist, forgé en1950 par Hans Asplund (3). Fils de l’architecte Eric Gunnar Asplund, il établissait à travers ce terme des passerelles entre l’architecture et l’Art Brut, une forme d’expression artistique établie en 1945 par Jean Dubuffet. Les racines sont peut-être plus anciennes : Lefaivre voit les origines du « brutalisme » de  van Eyck — qui ne revendiquait pas le terme — du côté de la peinture hollandaise du 16e et 17e siècle (4). Jean-Louis Cohen retrouve les caractères du brutalisme, que nous détaillerons plus loin, dans des œuvres construites avant 1945, comme l’église de Notre-Dame du Raincy (1922-23), de Perret, ou l’église Heilig Gast de Jože Plečnik a Vienne (1913) (5). 

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Couverture du livre « The New Brutalism : ethic or aesthetic » Reyner Banham, Reinhold, 1966
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Reyner Banham, « The New Brutalism », Architectural Review, décembre 1955
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Eglise de Notre-Dame de la Consolation du Raincy (1922-23), Auguste Perret © CRHM
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Eglise Heilig Gast de Jože Plečnik a Vienne (1913) © Michael Kranewitter – Eigenes Werk

 

« Brutalisme », une rime à « traumatisme »

En dépit de ces exemples brutalistes avant la lettre, la date de 1945 fait consensus pour marquer les débuts du Brutalisme. « Jusqu’à son nom, le Brutalisme est inséparable de la guerre » affirme Béatriz Colomina. Si, comme certains l’affirment, le modernisme est une réponse au traumatisme de la Première Guerre mondiale (6), sa déclinaison Brutaliste est une réaction à la Deuxième Guerre mondiale. Colomina revient sur la biographie des figures architecturales de l’après-guerre, soulignant leur participation active au conflit. Colin Rowe s’orienta vers l’histoire de l’architecture parce qu’une blessure à la colonne vertébrale qu’il s’était faite lors d’un parachutage l’empêchait de se pencher trop longtemps sur une table à dessin. James Stirling, son compagnon de régiment dans l’armée de l’air, avait pris part au débarquement et fut sérieusement blessé à Caen. Les architectes Alan Colquhun et Robert Maxwell s’étaient rencontrés dans l’armée des Indes, et Colquhun fut blessé en Birmanie. Les dommages de la guerre atteignaient autant les civils que les soldats. Et nul besoin de monter au front pour éprouver les forces destructrices de la guerre. « La maison hachée par les bombes alors que les femmes sont encore dans la salle de bain, le reste de l’habitation détruite mais les papiers peints et le feu se consumant encore dans l’âtre. Qui allumera un cierge à cette sorte de surréalisme de la vie réelle », se demandait le photographe Nigel Henderson, membre de l’indépendant Group et compagnon de route des Smithsons (7). Que ce soit au Japon ou en Angleterre, on retrouve les mêmes photomontages de projets architecturaux édifiés sur les ruines et les destructions de la guerre (8). Les 600 aires de jeux construites par van Eyck dans le quartier Jordaan à Amsterdam prennent la place de maisons détruites prises à leurs occupants juifs. Dans ce sens, l’architecture brutaliste apparaît comme un projet de reconstruction, qui, par rapport aux précédentes, affirme une dimension cathartique (9), détournant l’énergie destructive au service d’un projet d’édification pouvant contenir dans les murs la brutalité du monde._Olivier Namias

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Ensemble de logements Alexandra and Ainsworth Estate, London Borough of Camden Architect’s Department (Responsable de projet : Neave Brown), Londres, Grande Bretagne, 1967–1979 © Gili Merin – Extrait du livre SOS Brutalism, Park Books, 2017
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Ecole secondaire moderne d’Alison et Peter Smithson (aujourd’hui Smithson High School), Hunstanton, Grande Bretagne, 1949–1954 © Xavier de Jauréguiberry – Extrait du livre SOS Brutalism, Park Books, 2017
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Building 5, Institut électrotechnique de Leningrad (aujourd’hui Saint Petersburg Electrotechnical University) de Victor Leviash et Naum Matusevich. Saint Petersburg, Russie, 1965–1975 © Nikolai Vassiliev – Extrait du livre SOS Brutalism, Park Books, 2017

(1) Les actes viennent d’être publiés chez Park Books avec l’ouvrage SOS Brutalism. Contributions to the international symposium in Berlin 2012, Wüstenrot Foundation/Park Book, 2017

(2) Voir l’essai d’Ann Susan et Katie Chen, « the Mental Disorders that gave us Modern Architecture », commonedge.com (https://www.citylab.com/design/2018/01/the-perils-of-diagnosing-modernists/551096/) et la réponse de Darran Anderson « The perils of Diagnosing Modernists », Citylab.com https://www.citylab.com/design/2018/01/the-perils-of-diagnosing-modernists/551096/

(3) Reyner Banham, The New Brutalism, Architectural Press, 1966. ed. française le brutalisme en architecture, Dunod, 1970

(3) Liane Lefaivre, « Aldo van Eyck, the Humanist Rebellion, and the Reception of Brutalism in the Netherlands », contributions…, op. cit., p.77-84

(4) « cela remonte à la tradition hollandaise de la peinture du 16e et 17e siècle, qui célébrait les aspects grivois et sales de la vie de tous les jours, avec des peintres comme Rembrandt, Carel Fabritius, Peter de Hooch, Jan Steen », Liane Faivre, op. cit., p.80

(5) Jean-Louis Cohen, « Western Europe : Beyond Great Britain: Proto-Brutalism and the French Situation », SOS Brutalism – A Global Survey, Deutsches Architekturmuseum/Wüstenrot Foundation/Park Books, 2017. 

(6) Beatriz Colomina « Brutalism and War », Contributions to the international symposium in Berlin 2012, Wüstenrot Foundation/Park Book, 2017, pp.19-29

(7) Ibid., p.19

(8) voir les photomontages des Smithson pour le projet de Golden Lane (1952) et ceux plus tardifs d’Isotazaki.

(9) C’est la thèse de certains auteurs comme Emmanuel Rubio, vers une architecture cathartique (1945-2001), Éd. Donner Lieu, 2011

 

A lire dès demain : Instagram vs Banham

 

Les cent formes de la folie architecturale : la revue de presse du 5 décembre 2017

La LC4, chaise longue ou star du porno ? — Archisutra, le Kama Sutra pour architectes — Un dôme et un tore pour Dubaï — Dubaï : sauver le patrimoine grâce à l’énergie — Comment Vincent Callebaut reconstruirait Mossoul — Quand « Guitare » rime avec « Canard » — 5 raisons de supporter Calatrava — Tour en cours à Toulouse — Mr. Bean chez Richard Meier. La revue de presse du 5 décembre 2017 

 

 

Du X pour la LC4

C’est un versant de la Corbumania peu connu, ou que ceux qui connaissent prétendront ignorer : l’utilisation du mobilier du Corbu dans le cinéma porno, en particulier de la LC4. La chaise longue où se reposait Charlotte Perriand, sa co-conceptrice, a été rebaptisée candidement « la chaise à baise » dans un film dont on ignore le nom. « Elle fait partie de ces objets qui ont été tellement utilisés dans les films X qu’ils sont devenus un peu comme des amis pour les chefs déco. J’aurais rêvé d’avoir cette pièce de Le Corbusier dans mon arsenal », confie Christopher Norris qui a longtemps été en charge de la décoration sur les tournages du site kink.com. Augustine et Josephine Rockebrune (de Cap Martin) on consacré un ouvrage à cette pièce de mobilier, qu’elles ont recherché dans 800 films disponibles sur le web « Nous avons trouvé nous-mêmes les cent premières scènes. Pour effectuer le reste des recherches, nous avons embauché sur le web de la main-d’œuvre basée à Chandigarh. C’était notre façon de rendre hommage à Le Corbusier, mais aussi à l’Inde qui est l’un des plus gros consommateurs de porno en ligne. » Un travail sans nul doute harassant, au terme duquel on peut avancer deux hypothèses quant à l’omniprésence de la LC4 sur les plateaux pornos : le tournage dans une poignée de maisons louées dans la vallée de San Fernando, et la versatilité de l’objet « Il suffit que les chefs décorateurs équipent ces propriétés de quelques (fausses) chaises Le Corbusier pour que l’objet finisse par apparaître partout à l’image. (…) Dans le milieu du X, avec le rythme effréné des tournages, le décorateur doit pouvoir créer un nouvel espace en réagençant différemment les éléments qu’il possède », explique Christopher Norris. L’historienne du design Alexandra Midal prophétise «  Maintenant, ce fauteuil incarne certainement pour une génération entière quelque chose de l’ordre de la pornographie. C’est formidable d’emmener par exemple des étudiants au MoMA pour voir ce fauteuil. Car ils diront : “Ah je l’ai vu dans un porno !” ». Utiliser le porno pour promouvoir l’archi moderne : une tactique déjà employée par Hugh Heffner, qui se servait de son magazine Play Boy pour faire la propagande du mobilier design.

Via Slate 

Photos DR via Slate

 

Sex and the archi

Ne dites plus « je regarde des livres de “boules” », mais « j’approfondis ma connaissance de l’architecture ». Les sœurs Rockebrune ont rassemblé les ébats des acteurs du X sur chaise longue LC4 dans un ouvrage intitulé « We don’t embroider Cushions here* » — commentaire que Le Corbusier avait lancé à la jeune Charlotte Perriand qui venait lui présenter son portfolio. Miguel Bolivar, un architecte installé à Londres, vient de publier Archisutra, version architecturale du Kamasutra. Oubliez la vague, le grand pont ou le derviche à grand braquet : l’art d’aimer rejoint ici l’art de bâtir, et les positions se réfèrent à l’architecture, prenant le nom de Eames it in, the Petronas, Truss me. Elles sont illustrées par des personnages normalisés tracés au normographe – détourné ici en pornographe – avec indication des angles à respecter façon Neufert. Après le Modulor, de Le Corbusier, le Copulor, manuel orthonormé de l’amour en bâtiment ?

* Ici, on ne brode pas des coussins

Via Dezeen 

Match Dubaï/Abu Dhabi : bientôt 1 dôme partout

Après les folies du corps dans l’architecture, place aux folies architecturales tout court. Cap sur les Émirats Arabes Unis, ou le vent du délire bâtisseur souffle plus fort qu’ailleurs. Dubaï, sans doute jaloux du dôme du Louvre d’Abu Dhabi, annonce qu’il construira un dôme de 67,5 m de haut et large de 130 mètres à l’occasion de l’Expo 2020, suivant des plans de Adrian Smith + Gordon Gill Architecture. Quand Abu Dhabi exprime le poids du dôme de Nouvel en équivalent tour Eiffel, Dubaï préfère utiliser des unités plus locales : son ouvrage, utilisant 13 600 mètres d’acier, pèsera le poids de 500 éléphants, soit 2 265 tonnes. « Je suis très impatient de voir ce dôme s’élever et prendre forme, déclare Ahmed Al Khatib, Vice président de l’immobilier à l’Expo 2020. à l’occasion de l’attribution du marché à la société Cimolai Rimond. “Les dimensions de la structure sont impressionnantes — assez grande pour héberger un Airbus A380 d’Emirates, avec une surface au sol équivalent à pratiquement cinq terrains de football” ». Autant d’idées pour la reconversion du site quand l’expo aura fermé ses portes.

Via Albawaba

 

Match Dubaï/Abu Dhabi : 1 tore à 0

Le dôme n’est que la première cartouche de la riposte architecturale Dubaïote. L’Émirat a dans ses cartons un autre projet, le musée du Futur, qui remporte déjà un prix alors qu’il n’est même pas sorti de terre. L’Autodesk University 2017 a attribué son trophée AEC (Architecture, Engineering and Construction) à ce projet conçu en BIM, catégorie Édification : « Le musée sera implanté à côté des tours Emirates, à Dubaï, et aura la forme d’un tore déformé, avec une façade de verre et d’acier inoxydable sérigraphié d’une calligraphie arabe rétroéclairée ». Selon le jury, « alors que l’intérieur de bien des musées regarde vers le passé, dans ses sept étages, le musée du Futur présentera des expositions d’innovation et d’incubation de nouvelles idées, et de plus sera équipé d’un laboratoire et d’un auditorium pour 400 personnes ». Nous voilà rassurés : la forme du lieu laissait penser que le musée serait dédié à Spirou, personnage de BD évoluant dans un univers peuplé de bâtiments virgulomorphes (soit en forme de virgules).

Via Clarin

impact. La forme torique du futur musée de Dubaï via Clarin

 

Derby dubaïote : passé contre présent

L’architecture spectacle n’est que le versant médiatique d’une fièvre constructive toujours haute à Dubaï « Nous voyons, dans notre quotidien d’ingénieurs structures, beaucoup de bâtiments anciens, historiques et culturels être démoli pour laisser la place à de nouveaux bâtiments, explique Mohamad Khodr Al-Dah. Nous démolissons une villa pour construire un immeuble de quatre étages. Puis, avant que l’on s’en rende compte, on détruit l’immeuble de quatre étages pour construire une tour de 20 niveaux », poursuit l’ingénieur, conscient des conflits d’intérêts générés par sa position. La construction d’une tour donne du travail et fait tourner les bureaux d’études, mais la destruction continue risque de faire perdre le patrimoine architectural de l’Émirat. Le performance based contracting — contrat avec résultat — pourrait peut-être favoriser la réhabilitation plutôt que la destruction. Avec ce système, c’est l’entreprise qui finance les travaux et la modernisation des équipements fluides : elle se paie sur les économies d’énergie réalisées. Les propriétaires ne déboursent pas un sou. Ceux qui voudraient faire valoir un manque à gagner (un immeuble de trois étages rapporterait 54 451 US $, contre 544 514 US $ pour un bâtiment qui en compterait dix) pourraient se voir accorder une subvention ou faire racheter leur immeuble par le gouvernement. Il est des lieux ou rester bas coûte de l’argent…

Via Construction Week On Line 

 

Ruches saoules à Mossoul

Mossoul libérée, mais Mossoul dévastée. « La vieille ville a été laminée, ses immeubles écroulés, ses ruelles anéanties. Les quartiers de la rive ouest n’existent pratiquement plus et la mosquée Al-Nouri et son minaret ont été dynamités par Daech. Au total, entre 50 et 75 % de la ville ont été rayés de la carte, ne laissant que des millions de tonnes de gravats. Selon le gouvernement irakien, il faudra plus d’un milliard de dollars pour réhabiliter les services de base à Mossoul. Près de 700 000 habitants ont fui la cité et ne sont pas rentrés », relate l’édition belge de Paris-Match. Vincent Callebaut, connu pour ses visions futuristes, a un plan pour reconstruire la ville martyre « Fasciné par les villes vertes, cet architecte souhaite non pas reconstruire la ville à neuf vers sa périphérie, mais la recycler depuis son cœur. ‘Les pelleteuses commencent à déblayer les gravats… Dans une logique d’économie circulaire et d’upcycling, tout ce qui peut être réutilisé, recyclé et transformé doit être inventorié et valorisé’, explique-t-il. Il a donc imaginé ‘Les 5 ponts agricoles’, un projet qui vise à reconstruire les cinq ponts de Mossoul qui reliaient les quartiers ouest et Est avant d’être détruits par l’armée irakienne pour encercler Daech ». L’ensemble évoque un avatar d’Habitat 67 en version orientale, rappelant l’architecture indienne et le croisement d’une ruche avec les jardins de Babylone. Mais comment construire cette opération de 55 000 logements possédant potagers sur le toit ? Vincent a un plan : il « souhaite s’appuyer, une nouvelle fois, sur la technologie et cinq imprimantes 3D en forme d’araignées articulées. Des drones autonomes leur apporteraient, en continu, des matériaux de construction provenant des quartiers en ruines, préalablement broyés et transformés dans des recycleries. Grâce à ces ressources, les araignées robotisées pourraient ainsi imprimer les modules d’habitation ‘en dirigeant n’importe quelle buse de construction comme celles utilisées pour verser le béton et les matériaux isolants ou encore en utilisant une tête de fraisage ». C’est comme si c’était fait…

Via Paris-Match

Le projet est intitulé « Les 5 ponts agricoles » | © Vincent Callebaut Architecture via Paris Match

 

Guitarchitecture

L’information était presque passée inaperçue, et pourtant, comme le dit justement Charles Trainor, journaliste du Miami Herald « Hard Rock n’a pas donné dans la finesse sur ce coup ». La chaine aux 168 cafés, 23 hôtels et 11 casinos célébrait fin octobre le lancement du chantier de son nouvel hôtel. Au son de la batterie de Nicko McBrain, batteur d’Iron Maiden, les dignitaires des tribus indiennes Seminole, nouveaux propriétaires de la chaîne, et les pontes du Hard Rock, brisaient en cœur une guitare acoustique sur une guitare électrique pour annoncer la construction de leur tour hôtelière… en forme de guitare ! James Allen, Directeur général du groupe, se rappelle avoir eu l’idée d’un hôtel guitaromorphe en 2007. « À l’époque, même les architectes chargés du projet ne comprenaient pas ma vision. Leur premier projet accolait un bloc rectangulaire à une façade de verre en forme de guitare. (…) J’ai dit, nous parlons bien d’un bâtiment qui prend effectivement la forme d’une guitare », a dit Allen lors de l’inauguration « C’est un autre moment de ma vie où les gens ont vraiment pensé que j’étais totalement dingue ». Ses architectes auraient-il mieux compris s’il avait demandé un canard architectural prenant en l’espèce la silhouette de l’instrument roi du rock ? Peu importe, Allen jubile « il n’y a vraiment, sans aucune exagération, rien de comparable au monde ». Dommage que sa guitare soit privée de manche avec restaurant panoramique. McBrain a également exprimé ses regrets à la presse « où est l’hôtel en forme de batterie ? ». Heureusement qu’Hard Rock est peu versé dans la musique symphonique : son complexe hôtelier s’étendrait de Miami à New York.

Via Miami Herald 

http://www.miamiherald.com/news/business/article180878501.html

 

Valence : apprivoiser Calatrava

Une fois la folie construite, il faut vivre avec. Les Valenciens souffrant des projets de Calatrava l’ont bien réalisé, et tentent de trouver des raisons de vivre avec leur cité des sciences calatravesques disproportionnées, ou leur opéra qui perd son revêtement de carrelage. Un article envisage sous l’angle ironique la réconciliation de la ville avec le « divin de Benimàmet », commune de la métropole de Valence, grâce à cinq axes stratégiques. Profiter de la célébrité de l’architecte, s’approprier ses ‘produits’, l’utiliser comme cheval de Troie touristique, le séparer de la classe politique qui l’a promu, et laisser faire le temps, en comptant sur un retournement critique spectaculaire. « Des œuvres comme la sienne demandent du recul, explique le président du syndicat des acteurs valenciens (…). Il peut se passer la même chose qu’avec Gaudi : à son époque, tous les barcelonais voulaient le tuer, mais dès que c’est devenu un produit commercial tous se sont mis à l’aimer. Nous préférerions sans doute que Valence soit connue pour la Lonja (bourse du commerce du XVe siècle), mais elle est réputée pour Calatrava. Si tu n’en fais pas ton icône, Abu Dhabi le fera »— si l’icône vient à manquer aux Emiratis.

Via Valencia Plaza

 

Au haut Toulouse

À propos d’icônes, où en est la Tour Occitanie ? se demande La dépêche du Midi. La compagnie de Phalsbourg a chargé Libedskind de concevoir une centaine d’appartement et de chambres d’hôtel, 10 000 m2 de bureau et deux restaurants sur un terrain bordant le canal du Midi, à Toulouse. Haute de 150 mètres, la tour sera le premier IGH de la Ville Rose. « (La) demande de permis de construire doit être présentée à la fin du 1er trimestre 2018. Après environ cinq mois d’instruction, le permis doit être déposé par la Métropole. ‘’Nous travaillons déjà à son instruction, afin qu’il entre dans les règles d’urbanisme’’, précise Annette Laigneau, vice-présidente de Toulouse métropole. Et le chantier pourrait commencer au premier semestre 2019. Si tout va bien. (…) «Il faut prendre en compte d’éventuels recours, et peut-être miser davantage sur un début du chantier à fin 2019’’, poursuit Annette Laigneau. Après ? Le chantier devrait durer 36 mois, soit une livraison, au plus tôt, pour mi-2022 ». L’architecte des bâtiments de France donnera un avis, une commission du ministère de la transition écologique et la DRAC étudieront également le dossier, et une pétition contre le projet a recueilli 1200 signatures. En bref, l’affaire suit son cours.

Via La depeche

 

Le Meier d’entre nous

On peut incarner un personnage maladroit à la télévision et aimer l’architecture moderne. Rowan Atkinson a remplacé son manoir année 30 par une maison dessinée par Richard Meier. Après 5 millions de livres de travaux, Atkinson règne sur une bâtisse équipée d’un salon atrium, de toiture à panneaux solaires, d’une maison d’ami et d’un garage secret caché sous un toit végétalisé ou il entrepose sa flotte de voiture de luxe. Le jardin a été dessiné par le paysagiste Tom Stuart-Smith qui a reproduit une prairie devant la maison.

Via Ary News

Picture courtesy: Dezeen
Picture courtesy: Dezeen

 

Olivier Namias

Une vente exceptionnelle d’appliques signées Le Corbusier

Une vente exceptionnelle d’appliques signées Le Corbusier

Après avoir été exposées au public durant quatre jours, quelques 106 lots design seront mis aux enchères chez Artcurial le 30 mai prochain à 20 heures. Parmi eux, du mobilier et des objets signés par de grands noms, tels Jean Prouvé, Ettore Sottsass ou encore Le Corbusier, avec un exceptionnel ensemble d’appliques issues de l’unité d’habitation de Firminy.

 

A quelques kilomètres de Saint-Etienne, la ville porte plus que toute autre commune française l’empreinte de l’architecte. Véritable incarnation de son modèle utopique de société, le site de Le Corbusier est constitué d’une église, d’une maison de la culture, d’un stade et d’une unité d’habitation, construite sur le même modèle que la Cité radieuse marseillaise. Son chantier sera conduit par André Wogenscky car Le Corbusier décède trois mois après la pause de la première pierre.

 

Habitée depuis son inauguration en 1969, elle a fait, au début des années 2000, l’objet de travaux de rénovation au cours desquels les appliques imaginées par Le Corbusier pour éclairer les « rues centrales » ont été remplacées. Ce sont donc ces luminaires originels qui chercheront très prochainement acquéreurs et dont Emmanuel Bérard, directeur du département Design de la maison de vente, nous révèle plus précisément l’histoire et l’esthétique.

 

 

Vente « Design » le 30 mai 2017 à 20h chez Artcurial,

7 Rond-Point des Champs Élysées

75008 Paris

 

Lire aussi : Firminy, la cité méconnue de Le Corbusier

 

Mode, Modernisation, rénovation, destruction : la revue de presse du 14/03/2017

La MAPA d’Alfortville se modernise, l’Afrique cherche des alternatives au béton, une marina en île de france, la mode kiffe l’archi, Fallas et architecture, Le Corbusier, Khrouchtchev : du rififi à Moscou, le Quebec cherche une politique architecturale.

 

 

Du neuf avec les vieux

À Alfortville « la fusée de Tintin » ou « Goldorak », la maison d’accueil pour personnes âgées (MAPA) la plus délirante de France, va s’offrir une cure de jouvence à 2,4 M€. C’était l’œuvre de la vie du maire de l’époque, Joseph Franceschi, qui avait voulu cet « endroit de liberté », dont il disait avoir imaginé jusqu’à la « couleur des carrelages et la dimension des portes ». Néanmoins, Franceschi n’aurait jamais pu construire cette chose sans le secours de Manuel Nuñez, architecte alors en vogue. La remise aux normes incendie et la prévention des risques inondation impose d’important travaux à l’établissement de 60 lits. « Ce projet (…) “Ambitieux”, selon le maire PS Luc Carvounas, pour “un marqueur de la ville” a reçu le soutien de l’État. Une aide de 500 000 € a été débloquée par la secrétaire d’État à l’Autonomie, Pascale Boistard, qui s’ajoute à la subvention du Département (300 000 €). Le reste est financé par emprunt, à charge du groupement Les EHPAD publics du Val-de-Marne » nous apprend Le Parisien-Val de Marne. Le quotidien recueille au passage le sentiment des pensionnaires sur la vie dans la maison. Micheline Osinski déclare aimer le grand atrium, remède au sentiment de solitude. Quand au « cantou » — coin du feu en occitan — lieu de rencontre qui occupait le rez-de-chaussée, il sera déplacé à l’étage pour être à l’abri des inondations. Qui osera dire que la vieillesse fait un naufrage ?

Via Le Parisien

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Alfortville, ce jeudi. La maison d’accueil pour personnes âgées Joseph-Franceschi a Alfortville a ouvert ses portes le 14 décembre 1987. LP/A.V Via Le Parisien
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Le « cantou » au rez-de-chaussée. LP/A.V. via le parisien

 

LAfrique, premier continent sans béton?

« Dans sa quête de modernité, le bâtiment africain s’est malheureusement coupé de sa tradition bioclimatique séculaire, un ensemble de savoir-faire qui a permis aux habitants d’affronter des climats parfois extrêmes. Aujourd’hui, sur le continent, les constructions sont souvent mal adaptées au climat chaud, thermiquement inconfortables et énergivores » constate Le Point Afrique. Porté par la popularité d’architectes comme Francis Kéré, David Adjaye, ou du défunt Hassan Fathy, les architectes et les ONG entament des recherches dans les matériaux de construction : terre crue, mais aussi typha, un roseau dont la structure alvéolaire présente d’intéressantes caractéristiques d’isolation et de perméabilité à l’air. « Le typha semble aujourdhui être linnovation la plus en vue et la plus avancée; mais nul ne sait si elle va tenir ses promesses », explique l’article. L’enjeu est de taille : 80 % des bâtiments qui seront habités en 2050 ne sont pas encore construits.

Via Le Point Afrique 

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À Dakar, au Sénégal. © Jeff Attaway/Flickr, CC BY via le point afrique
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Des hommes en plein travaux d’une maison bâtie avec du typha via le point afrique
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Exemple de construction habitation au Sénégal, à partir du typha. © Flirck via le point afrique

 

Aux diplômés d’archi, le Maroc pas reconnaissant

« Les étudiants de l’EAC (école d’architecture de Casablanca) ont fait un choix courageux et ambitieux d’étudier au sein de leur pays, dans le cadre socio-économique dans lequel ils seront amenés à travailler demain et en sont fiers. Leurs profils sont largement appréciés tant sur le marché marocain qu’international, des étudiants ont même pu joindre des cabinets internationaux d’envergure (Espagne, France, Belgique, Pays-Bas et Italie) ». Pourtant, l’association des lauréats et étudiants de l’école d’architecture de Casablanca (ALEEAC) demande en vain depuis 2004 la reconnaissance officielle du titre délivré par l’école, et le droit d’exercer le métier et le port du titre d’architecte en nom propre pour tous ses étudiants diplômés. Une situation incompréhensible, l’EAC ayant été créé par l’État marocain suite à appel à manifestation d’intérêt auprès des architectes, un cahier des charges contraignant encadrant les enseignements. L’établissement est placé sous la double tutelle du ministère de l’urbanisme et l’aménagement du territoire et du ministère de l’Enseignement supérieur. C’est ce dernier qui fait attendre l’agrément d’équivalence qui permettrait la reconnaissance de la formation déjà évaluée positivement à maintes reprises par l’ENA locale. Pas archi pressé, au ministère de l’Enseignement supérieur !

via Le Desk 

 

 

Quand la mode aime l’archi

« Quand j’étais étudiant, je créais des bâtiments autour des corps, pas des vêtements. Aujourd’hui, dix ans après, j’ai encore cette obsession. Je vois parfois la silhouette comme un building sur lequel j’appose l’esthétique gothique de Bruges, ma ville natale. Cela se traduit par des lignes extrêmement verticales, allongées, qui mènent le regard vers le haut et des jeux de patronages cachés » explique Guy Martens, qui est devenu directeur artistique la marque de vêtement Y/project après des études de design intérieur. Un des nombreux exemples attestant de l’engouement pour l’architecture qui traverse actuellement le monde de la mode. «Les accessoires semblent aussi de plus en plus conçus comme des édifices. On pense à la géométrie précise des sacs et pochettes d’Hugo Matha, créés dans des matériaux souvent utilisés en construction, comme le bois ou le Plexiglas. Il y a aussi les bijoux graphiques de l’Américain Eddie Borgo, inspirés par les édifices modernistes, ou les mallettes de Young Jin Jang, influencées par la fonctionnalité des immeubles coréens» explique le magazine Grazia. L’architecture sert à la fois de modèle et d’écrin « Une silhouette doit désormais évoluer dans un contexte. Elle sera d’autant plus instagrammée. Un styliste ne pense plus seulement à une jupe ou un haut, mais à un look, à la fille qui va l’incarner et où elle va le faire. […] Nicolas Ghesquière, féru d’architecture, présente depuis deux ans la ligne Croisière de Louis Vuitton dans des édifices emblématiques». Quels sont les architectures les plus en vogue, et pourquoi ? «Les lieux donnent des références subconscientes, qu’il s’agisse d’espaces urbains connus du type Niemeyer, ou de monuments célèbres comme l’abbaye de Westminster, où Gucci a présenté son défilé croisière 2017″, précise Serge Carreira. Comme les lieux de shows, les boutiques doivent refléter avec précision la vision du créateur». Pour paraphraser le designer Raymond Loewy : l’architecture fait vendre.

via Grazia 

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En mai 2016, Louis Vuitton présentait sa collection Croisière 2017 au musée d’Art contemporain de Niteroi, à Rio via grazia

 

Une politique architecturale pour le Québec

Pendant que les fashionistas tentent d’épuiser les icônes de l’architecture, Nathalie Dion, présidente de l’Ordre des architectes du Québec, cherche à doter la belle province d’une politique architecturale cohérente. Les citoyens de treize villes québécoises vont être consultés pour expliquer en quoi l’architecture influence leur vie quotidienne, dire ce qui leur plaît dans les édifices et lieux publics qu’ils fréquentent, et donner leurs idées sur la sauvegarde du patrimoine. Les informations recueillies permettraient « de doter l’État d’une vision commune de l’architecture […], d’harmoniser les règles, les règlements, ce qui ferait en sorte que les bâtiments répondraient durablement aux défis d’aujourd’hui et de demain. On peut parler des changements climatiques, du vieillissement de la population, de la cohésion des communautés et de la préservation du patrimoine » a déclaré Nathalie Dion,, non sans préciser qu’un tel projet « ne pouvait pas se réaliser en criant “lapin” ». Pas plus qu’en criant « chameau », l’animal totem symbole des malfaçons architecturales.

via L’Actualité 

 

Un nouveau havre pour les navigateurs du Grand Paris

Un port de plaisance : voilà sans aucun doute un équipement dont la région parisienne est insuffisamment dotée. Une carence cruelle que Cormeilles-en-Parisis entend combler, avec la construction d’une marina de 150 à 200 anneaux et 1200 logements. « Depuis que le cimentier Lafarge a trouvé un accord avec Bouygues Immobilier pour la vente de son terrain de 22 ha sur les berges de Seine, les choses “avancent plus vite que prévu”, selon le maire (LR), Yannick Boëdec, qui prévoit […] l’arrivée des premiers habitants pour 2 022 ». Le maire de la commune voisine de Sartrouville est emballé, celui de La Frette, autre commune limitrophe, « ne voit pas le projet d’un mauvais œil ». Un architecte compétent en la matière est déjà au travail « il s’agit de Xavier Bohl, qui a déjà imaginé Port Grimaud et Port Fréjus, dans le Var, ou encore Port Chiberta, à Anglet, dans les Pyrénées-Atlantiques. À en croire le premier visuel dévoilé par Yannick Boëdec sur sa page Facebook, Port Cormeilles ressemblera à s’y méprendre à Port Cergy, la première marina construite en Île-de-France. “Ce sera différent, nuance l’édile. Car le bassin qui accueillera les bateaux ne sera pas dépendant des variations du niveau de la Seine.”». Il ne reste plus qu’à construire une mer digne de ce nom pour baigner ces deux ports de légende.

Via Le Parisien 

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Selon le premier visuel architecte dévoilé, le futur port de plaisance de Cormeilles-en-Parisis ressemblera à celui de Port-Cergy. (Atelier Xavier Bohl) via le parisien

 

L’architecture mise à nue par ses bûcherons, même

Depuis Twin Falls, Idaho, Liyah Babayan, gérante de l’Oh La La boutique, témoigne « vous retournez dans la rue, et là c’est un genre de choc au départ quand vous réalisez qu’il manque quelque chose. Et vous réalisez que ce sont les arbres », qui bordaient la route, et que la ville a fait couper pour le plus grand mécontentement de certains clients fréquentant les commerces du lieu. Mais il y a plus grave « sans les arbres, les gens ont commencé à remarquer combien la ville était ancienne (c’est à dire que certains de ses bâtiments ont été construits vers 1900, NDLR), et qu’elle aurait besoin de quelques réparations ». Sans les arbres, remarquent d’autres, l’architecture est complètement exposée, pour le pire et le meilleur : «ce sont de magnifiques bâtiments, s’enthousiasme un commerçant, ils ont de la personnalité, une histoire… ». Les premiers ravalements sont envisagés pour leur redonner leur lustre d’antan et leur valeur d’aujourd’hui. À Twin Falls, c’est donc bien l’arbre qui cachait la forêt d’édifices.

via KMVT 

 

Un Gabon sans foncier ?

«Si nous n’y prenons garde, il n’y aura plus de foncier pour l’Etat gabonais avant la fin du siècle, peut-être même avant. Parce que tel que c’est parti avec la multiplication des SCI et de projets parfois mal conçus, l’État est en train de perdre le foncier» a avertit le vice-premier ministre du Gabon Bruno Ben Moubamba. Pour parer à cette éventualité, l’administration centrale gabonaise met sur pied «un nouvel ordre urbanistique» et enjoint ses agents à « proposer des esquisses de planification de vos villes, en projetant des réserves foncières qui seront transformées en déclaration d’utilité publique, afin de sécuriser le foncier». Une initiative bien perçue par les directeurs provinciaux de l’urbanisme « pour faire face à l’anarchie foncière, ils ont promis faire œuvre pédagogique en sensibilisant les acteurs des collectivités locales qui, parfois font primer le droit coutumier sur le droit légal».

Via Gabon Review 

 

 

Deux auxerrois architectes et falleros

Étrange destin qui a conduit Romain Viault et Xavier Laumain, deux architectes auxerrois à construire une falla, un monument de carton-pâte exposé dans les rues de Valence (Espagne) durant la fête des Fallas. Baptisée Postnatura, leur falla « nous projette dans un avenir incertain, où l’Homme n’a pas su préserver son environnement. L’arbre, souvenir de cette Nature disparue, est devenu un produit industrialisé, mercantile, et prêt-à-monter », explique Romain Viault. Figure centrale, l’arbre est fait d’un enchevêtrement de Y atteignant six mètres de hauteur. « Le “Y” n’a pas été choisi par hasard. En anglais, cette lettre se prononce comme “why”, qui signifie pourquoi. Un effet sémantique recherché par le duo d’architectes. “Cette sculpture invite à s’interroger sur le pourquoi de la dégradation de l’environnement”». Why alors, brûler ce monument et les 760 autres montés dans la ville au terme de quatre jours de festivité ? Le bilan carbone va-t-il condamner cette tradition, inscrite au patrimoine immatériel de l’UNESCO depuis 2016 ?

via L’Yonne 

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via l’yonne

 

A l’ombre du Corbu en pleurs

« Le moins que l’on puisse dire, c’est que Moscou est une ville au patrimoine urbain très chahuté », relève Antoine Picon, président de la fondation Le Corbusier. Picon et la fondation s’inquiètent du projet d’immeubles de 58 mètres qui risque de bientôt faire de l’ombre au Centrosoyouz, seul œuvre de Le Corbusier en Russie. « Si ce projet venait à être réalisé, il aurait pour conséquence de modifier de manière extrêmement dommageable l’environnement immédiat du Centrosoyouz dont la composition avait pris en considération l’ensemble des bâtiments existants à l’époque », a plaidé Picon dans une lettre adressée au maire de Moscou et au ministre de la Culture de Russie. Les experts jugeant, dans un style tout soviétique, les voisins du Centrosoyouz « moralement et physiquement dépassés », il y a de fortes chances de les voir disparaître. Classé monument historique, l’immeuble du Corbu est protégé des destructions, mais devra s’accommoder de ces mutations contextuelles.

via Le Parisien 

 

 

Moscou : de Khrouchtchev Vladimir fait table rase

Les vicissitudes du Centrosoyouz ne sont que moindre mal si l’on songe au sort qui attend 8 000 immeubles construits dans la capitale russe durant l’ère Khrouchtchev, des édifices de logements préfabriqués aussi surnommés « cinq étages » abritant 10 % de la population moscovite. Le maître du Kremlin vient d’ordonner leur démolition-reconstruction pour un coup représentant deux fois le budget annuel de la ville, soit 67 milliards d’euros, sans que l’on sache vraiment comment sera financée ce que le journal suisse Le Temps qualifie de «démolition du siècle». La plupart des habitants sont devenus propriétaires des logements durant les années 90. Certains occupants de ces « cinq étages » réputés pour leur médiocre qualité constructive se réjouissent « C’est un peu la honte d’habiter dans ce taudis. Les murs sont affreux, les canalisations sont pourries, il y a sans arrêt des problèmes d’odeur et d’infiltrations venant du toit ». D’autres craignent la relégation au-delà du périphérique local — très loin du centre — quand ils ne flairent pas l’entourloupe pure et simple «jai sué sang et eau pendant une année entière à tout refaire. Nous avons pu racheter lappartement voisin et nous avons maintenant un bel appartement de 100 m2. Et maintenant, on veut nous caser dans une cage à lapin et qui sait dans quelles conditions? On entend un tas dhistoires de logements neufs construits par l’État où on vous donne les clés dun appartement aux murs en béton nu et sans plancher!». Propriétaires de tous les pays, contre ce nouveau genre de logement fruit des noces baroques de l’autoritarisme post soviétique avec le capitalisme le plus débridé, unissez-vous !

via Le Temps 

vladimir-poutine_moscou_demolition_immeubles-sovietiques_1960
Vladimir Poutine ordonne la démolition du siècle via le temps

Olivier Namias

D’une Rome schizophrène aux 50 nuances de Gehry : la revue de presse du 01/03/2017

D’une Rome schizophrène aux 50 nuances de Gehry : la revue de presse du 01/03/2017

Le 3e âge de l’architecture, La Rome sans qualités, Beetlemania : les matériaux aussi, Menace sur le Concorde, 50 nuances de Gehry, Acouphènes architectoniques, Orléans turbulent, la probabilité d’un retard, Béton, banc cher : la revue de presse du 1 mars 2017

 

Le 3e âge de l’architecture

Après Bishops Cleeve, Cheltenham et Tewkesbury, Winchombe, une commune de 4 379 habitants du comté du Gloucester, va se doter d’une université du troisième âge (U3A), établissement sans vocation diplômante fonctionnant sur la mise en commun des savoirs. Pas de limite d’âge supérieure ou inférieure, « la seule qualification requise est l’enthousiasme », fait savoir le Gloucestershire live. Parmi les matières proposées, l’histoire de l’art, les échecs, la maquette de machines mécaniques, la marche (sic), l’observation ornithologique (le fameux Birdwatching), et… l’architecture ! La moindre nichée de faucons pouvant interrompre un projet – le cas s’est présenté récemment sur la caserne de Reuilly, à Paris – l’U3A se montre d’une acuité hors du commun, d’une pertinence dont elle n’a peut-être même pas conscience…

Via Gloucestershire Live 

 

La Rome sans qualités

Architecte, chercheur et photographe, Alessandro Lanzetta dresse dans les colonnes du Giornale dell’Architettura le portrait d’une Rome schizophrène. Le centre de la ville éternelle n’est plus qu’un ensemble hybridant le musée à péage et le mall pour touriste, la périphérie une nébuleuse hétéroclite de quartiers pavillonnaires plus ou moins prisés, de zones ravagées par la spéculation ou construites hors des lois de l’urbanisme en vigueur. Seul le GRA — l’équivalent local du boulevard périphérique — relie encore cet archipel que les règlements urbains se sont ingéniés à fragmenter en près d’une cinquantaine de morceaux, et ce depuis l’après-guerre. « Depuis de nombreuses années, on ne parle plus de projet urbain, d’idée forte, de vision d’ensemble capable de réunir les fragments bâtis d’une métropole qui tombe dans une situation infrastructurelle confinant à l’absurde ». Avant la ville avait des idées, comme orienter son développement vers la mer, ou se doter d’une myriade de cités-jardins. Époque révolue. « Le marché, qui a vendu immeubles et terrains en corrompant tous et tout, ne se sent pas intéressé par ce droit à la ville implicitement contenue dans les formes urbaines réfléchies et cohérences. Les politiciens ne veulent pas en parler : les habitants sont des votes facilement achetés à coup de promesses à coût zéro. Les urbanistes et les architectes, ceux disposant d’un miminum de compétence survolent le problème, trop occupés qu’ils sont à courir derrière le prochain marché public. » Au moins, tout le monde semble d’accord pour tourner la tête et se boucher le nez.

Via Il Giornale dell’architettura

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via il giornale dell architettura

 

Beetlemania : les matériaux aussi

C’est en observant le Cotinis mutabilis – en anglais le Figeater Beetle (Lit. Coléoptère mange-figue) que les chercheurs de département d’ingénierie de l’université du Nebraska Lincoln ont découvert un nouveau matériau à la fois ultra-résistant et ultraléger. L’exosquelette de l’insecte est composé de fibres de chitine d’un diamètre de 20 nanomètres (3 750 fois plus fin que le cheveu dont le diamètre atteint 75 000 nanomètres), arrangées en spirale, configuration connue sous le nom de Bouligand, ou plus trivialement d’escalier en colimaçon. Les recherches n’en sont qu’au début. Retrouvera-t-on ce matériau facilement incorporable dans les matières fibrés dans un béton coléoptère ultra haute performance ? Pour l’instant, on envisage l’utilisation de ces fils de carapace dans les transports aériens ou le secteur de la défense.

via Science Daily 

 

Menace sur le Concorde

Arrondi sur tous les angles, lisses et sans aspérités, le Concorde, cinéma de La Roche-sur-Yon, est menacé de destruction à l’horizon 2020, lorsque le cinéma d’art et d’essai qui occupe le lieu l’aura quitté pour rejoindre un cinéma plus neuf. Pourtant, le bâtiment « sort du lot », explique un membre du collectif Argone, qui se mobilise pour la sauvegarde de cette architecture 70 conçue par l’architecte René Naulleau, en association avec l’agence Barto. Le collectif réclame la labellisation du bâtiment au titre de « patrimoine du XXe siècle » contre la volonté de la mairie, qui se retrouverait alors avec un bâtiment intransformable. Pour l’adjoint à l’urbanisme, « le bâtiment est intéressant, mais difficilement reconvertible. Il y a peu d’ouvertures, par exemple. Si on interdit toute transformation et qu’aucune autre destination que le cinéma n’y est possible, le risque est qu’il devienne une friche et la Ville veut l’éviter à tout prix. » La lutte pour un atterrissage en douceur continue sur Change.Org, où le collectif Argone a déposé une pétition.

Via Ouest-France 

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Via Ouest-France

 

50 nuances de Gehry

Prophétique «Votre créativité commence avec votre curiosité». Introspectif « Vous devez trouver votre voix ». Implorant « promettez-moi de prendre le risque de faire quelque chose pour l’humanité ». Voici quelques phrases que l’on peut entendre dans la présentation vidéo de la master class de Gehry. Le Pritzker endosse les habits de coach pour apprendre tout ce qu’il sait de l’architecture en 15 leçons, rien que ça, pour la modique somme de 90 US$. Les plus chanceux auront le droit à une correction avec le maestro. Faut-il se ruer sur l’offre, ou attendre la sortie de la version holographique, avec enseignement du fameux doigt d’honneur de Frank O. en bonus ?

Via FastcoDesign

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Photo: Jason LaVeris/FilmMagic/Getty Images Via FastcoDesign

 

Acouphènes architectoniques

« Pourquoi ça tombe ? », demandait faussement candide l’ingénieur Mario Salvadori en titre d’un de ses ouvrages expliquant l’art des structures par leur faillite. « Pourquoi ça siffle ? », s’interroge le Guardian après que la tempête Doris ait mis en avant la propension siffloteuse de nombreux immeubles « les réseaux sociaux regorgent de plaintes contre les immeubles sifflants. Des ensembles de bureaux entiers ont été transformés en flûte divine par la tempête. Des vidéos chargées sur YouTube montrent la nouvelle aile d’un hôpital de Torbay en train de chantonner dans le vent… ». Et le phénomène n’a pas attendu le passage de Doris pour se manifester. À Manchester, la Beetham Tower conçue par l’architecte Ian Simpson s’est rendue célèbre pour ses penchants siffleurs avant même sa livraison. Le problème est lié à « des mécanismes de rétroaction lors de l’émission de tourbillons détachés » expliquent des scientifiques du département de recherche son et vibration de l’Université de Southampton. « Le remède aux sifflements est aussi unique que le bâtiment » détaille les chercheurs. Ainsi, le Cityspire de New York s’est fait dépouiller de tous ses stores à seul fin de lui couper le sifflet.

Via The Guardian 

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1WTC … sounded ‘like a train passing by’. Photograph: Siegfried Layda/Getty Images via The Guardian

 

Orléans turbulent

Coup de foudre dans la cité Johannique : la mairie d’Orléans et le Frac Centre décident de collaborer. « C’est la première fois en France, explique Abdelkader Damani, directeur du Frac centre, qu’un Frac s’associe à une collectivité locale pour ce que j’appelle la “fabrique du réel”. » Concrètement, le centre dédié à l’architecture contemporaine est désormais associé à l’élaboration des grands projets d’urbanisme de la municipalité ». Le FRAC va participer au choix du « MOBE (musée d’Orléans pour la biodiversité et l’environnement), CO’Met (la grande salle au parc des expositions), la Vinaigrerie Dessaux, la future piscine ou encore la cité musicale sur le site Porte-Madeleine. » « Petit à petit, le but est de construire une identité architecturale contemporaine à la ville, de positionner notre métropole comme une métropole d’innovation architecturale », précise Abdelkader Damani.« Mais la coopération ne s’arrête pas là. Elle se fait aussi dans le domaine culturel. Les Turbulences participent désormais aux actions “hors les murs” de la municipalité. Surtout, la ville s’associe à la Biennale d’architecture lancée cette année par le Frac (lire par ailleurs), qu’elle financera à hauteur de 100.000 € par édition. “Pendant six mois, Orléans sera la capitale de l’architecture française voire mondiale !”, se félicite Nathalie Kerrien, adjointe à la culture ». Voire la capitale de l’architecture pour tout l’univers, vu le vaisseau rebelle qui fait office du siège du Frac Centre.

Via La République du centre 

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Via La République du Centre

 

La probabilité d’un retard

« Les professionnels le savent, les chantiers sont généralement en retard et coûtent plus cher que les devis établis. On peut rager contre les responsables ou la malchance. On peut aussi se demander : et si les coups du sort qui paraissent s’acharner sur ces vastes chantiers n’en étaient pas vraiment ? » Professeur de sociologie de l’université Paris-Diderot, Gérald Bronner mène l’enquête sur les fameux retards qui émaillent malheureusement trop souvent les chantiers. « Prenons un tout petit peu de hauteur, explique Bronner en montant dans sa grue. Ce type de projets ne peut être achevé qu’en respectant de nombreuses conditions : pas de retard dans la livraison du matériel, pas de météo trop défavorable, pas de mouvements sociaux, etc. Dans l’esprit de ceux qui ont à juger du calendrier de tels projets, la probabilité de rencontrer chacun de ces problèmes séparément est suffisamment faible pour inciter à l’optimisme. Cet optimisme est en réalité déraisonnable, car la probabilité qu’un projet se réalise sans encombre est la probabilité conjointe de la non-réalisation de chacun de ces événements. En d’autres termes, il aboutira dans les temps si telle condition est remplie, et telle autre, et telle autre, etc. Or l’esprit humain est mal équipé pour bien évaluer cette structure de probabilités composées : il a tendance à les surestimer largement ». Bronner poursuit « Ainsi, puisque nous posons rarement sur papier les probabilités (même grossièrement évaluées) associées à chacune de ces étapes, nous pouvons aisément avoir l’impression que le projet sera réalisé dans les temps. ». Les dépassements budgétaires observés sur les Philharmonies – à Hambourg ou Paris – les parlements écossais ou autre station du PATH à New York seraient les simples manifestations d’une foi inoxydable en l’avenir. Incurable optimisme du BTP !

via Pour la science 

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Via Pour la Science

 

Béton, banc cher

Les néophytes trouveront sans doute moche ce banc en béton trouvé dans le jardin de la maison d’un électricien de la métropole stéphanoise. Pourtant, ce banc-borne du modèle « Firminy » avait été dessiné par Le Corbusier, et aurait dû « civiliser » et éclairer les environs de la maison de la Culture de Firminy. L’artisan chargé de leur électrification avait gardé cet exemplaire du banc après que la mairie eut décidé de n’en installer que 18 sur les 20 initialement prévus par l’architecte- elle avait revu les plans du Corbu juste après son décès en 1965. Le banc est estimé à 18/22 000 euros par la maison Artcurial qui l’a mis aux enchères mardi dernier. Les trésors du XXe siècle sont des blocs en béton…

Via FranceTV info 

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Olivier Namias

Livres : une liste pour Noël

Architectures CREE, en association avec la librairie Volume, présente sa sélection de livres pour les festivités de la fin d’année 2016 ; une liste d’ouvrages éclectiques, où les points de vue de critiques, pratiques d’architectes et regards de photographes sur l’architecture se confondent, se répondent et s’interrogent, dans des « livres objets ».  De Londres à Shanghai, du brutalisme au bricolage, de Venturi à Perrault, ou de l’hôtel à l’église, se cultiver est une mission bien vaste qu’il nous faut commencer dès aujourd’hui. Vous en souhaitant bonne lecture ! 

brutal-london
Brutal London : construct your own concrete capital, Zupagrafika, éditions Prestel, octobre 2016, 72p., 24 x 28 cm, 19,99 £. ISBN : 978-3-7913-8300-2

Brutal London

Zupagrafika est un studio de création basé en Pologne, fondé par David Navarro et Martyna Sobecka. Le studio a une affinité particulière avec l’architecture moderniste, la typographie et le papier. Il conçoit, illustre et publie des objets primés, liés à l’architecture. La première partie de l’ouvrage examine la signification de chacun des bâtiments, au travers de textes et images. La deuxième partie du livre se compose d’une série de 9 bâtiments pré-découpés et pliés, imprimés sur du papier cartonné lourd, que les lecteurs peuvent détacher et construire avec des instructions faciles à suivre. 

Corbusier Jeanneret restauration Clarté Genève patrimoine
Le Corbusier & Pierre Jeanneret, restauration de l’immeuble Clarté Genève, Ed by Office du patrimoine et des sites, Birkhauser, octobre 2016, 192p., 29 x 24cm, 49.95 €. ISBN : 978-3-0356-0751-2

Le Corbusier et Pierre Jeanneret, restauration de l’immeuble Clarté Genève

L’histoire de l’immeuble Clarté construit à Genève par Le Corbusier et Pierre Jeanneret et surtout de sa restauration. (plan, photos, etc.)

structure works Mahendra Raj Mehta Raj Mehndiratta Huber
The structure, works of Mahendra Raj, Vandini Mehta, Rohit Raj Mehndiratta, Ariel Huber, Park Books, 2016, 428p., 19,5 x 25,5 cm, 68 €. ISBN 978-3-03860-025-1
difficult whole Robert Venturi John Rauch Denise Scott Brown
The difficult whole, a reference book on Robert Venturi, John Rauch and Denise Scott Brown, Kersten Geers, Jelena Pancevac, Andrea Zanderigo, Park Books, 2016, 216p., 21 x 30 cm, 48 €. ISBN 978-3-906027-84-5

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

The structure, works of Mahendra Raj

Agé aujourd’hui de 92 ans l’ingénieur Mahendra Raj a participé à la construction de Chandigarh avec Le Corbusier, il a aussi travaillé à New York, Delhi et Bombay. Ami intime du béton il a conçu (entre autres) avec Kuldip Singh (après sa séparation d’avec Raj Rewal) la très brutaliste tour du NDMC (New Delhi Municipal Corporation) à quelques pas de Connaught Place.

The Difficult Whole
En 1966, l’architecte Robert Venturi publie Complexity and Contradiction in Architecture, un manifeste qui devient l’une des plus importantes déclarations du XXe siècle sur l’architecture. Cinquante ans plus tard, ce livre propose une nouvelle analyse et une réévaluation approfondie de l’idée de « Difficult Whole » de Venturi et de son héritage. Grâce à une relecture radicale des documents d’archives, les éditeurs proposent une alternative crédible au discours architectural contemporain, qui tient compte des arguments de Venturi et offre un moyen d’aller de l’avant. Mettant en vedette des essais, ainsi que des analyses approfondies de vingt-huit projets de Venturi, Rauch et Scott Brown, The Difficult Whole est sûr de susciter la discussion et l’inspiration dans le monde de l’architecture et le design.

Groundscapes Dominique Perrault
Groundscapes : autres topographies, Dominique Perrault, Frédéric Migayrou, Editions HYX, 2016, 206p., 16 x 24 cm, 25 €. ISBN 978-2-910385-99-6

Groundscapes

Les éditions HYX publient le travail du spécialiste de la construction sous nos pieds, l’architecture du ‘groundscape’. Une idée, un concept, que l’architecte explore et expérimente depuis des années au sein de ses projets et au travers de ses fictions. « Une écriture du réel, une architecture souterraine où il ne s’agit pas de vivre sous terre mais d’inscrire les lieux de vie dans la terre, cet épiderme du sol ouvert sur le ciel. »

modern Lorraine churches Eric Tabuchi
Twenty-four modern Lorraine churches, Eric Tabuchi, Poursuite Editions, septembre 2016, 48p., 21 x 21 cm, 20 €. ISBN : 978-2-918960-92-8

Référence non dissimulée à Ed Ruscha, Twenty-Four Modern Lorraine Churches s’inscrit dans le genre du livre d’artiste. Il a été publié à l’occasion de Tables et Matières, exposition d’Eric Tabuchi présentée à la médiathèque des Abattoirs de Toulouse jusqu’au 7 janvier 2017. Inlassable explorateur des formes construites, Eric Tabuchi documente ici de façon sérielle les églises issues des campagnes de reconstruction de la région Lorraine. « Ce travail de recensement, s’il n’avait jamais été effectué et pour captivant qu’il ait pu être, ne représentait pourtant pas à mes yeux l’enjeu principal de cette série de photographies, explique Tabuchi. Il s’agissait d’abord pour moi de décrire une rencontre, dans les circonstances tragiques que nous connaissons, entre cette Lorraine à la fois rurale et industrielle et l’architecture moderne – entre ces paysages austères et ces formes nouvelles. Il fallait rendre compte de ce surgissement, de cette étrangeté et d’une certaine façon de l’incompréhension qui en a découlée. C’était une étrange idée de penser réparer le traumatisme de la guerre avec des édifices coulés dans le même béton que les blockhaus voisins »

Roger Eberhard Standard
Roger Eberhard, Standard, Photographs by Roger Eberhard. Texts by Franziska Solte, Benedict Wells, and Nadine Wietlisbach, Scheidegger & Spiess, 2016, 88p., 34 x 27,5 cm, ISBN 978-3-85881-528-6
Serge Fruehauf Extra Normal
Serge Fruehauf, Extra Normal, Joerg Bader, Scheidegger & Spiess, 2016, 200p., 23 x 20 cm, 48 €. ISBN 978-3-85881-527-9

 

 

 

 

 

 

 

Standard

Pour son dernier projet d’art conceptuel, le photographe suisse Roger Eberhard a parcouru cinq continents et a visité 32 villes où il a réservé la chambre double standard à l’hôtel Hilton local. Il a pris une photo de l’intérieur de la chambre et de la vue de sa fenêtre en utilisant toujours la même perspective, témoignant d’un design remarquablement uniforme. Trois essais complètent les photographies : un texte inédit du romancier allemand Benedict Wells qui réfléchit à la monotonie qu’il éprouve lors de ses voyages dans des suites de chambres d’hôtel. Franziska Solte, historien d’art, examine la chambre d’hôtel comme l’intérieur moderne par excellence. L’experte en photographie Nadine Wietlisbach analyse et contextualise le dernier travail d’Eberhard.

Extra-Normal

Pendant deux décennies, le photographe suisse Serge Fruehauf a documenté des détails architecturaux fascinants moulés dans du béton. Mais son regard se pose aussi sur des casses-tête surprenants et parfois absurdes créés par des interventions ultérieures – des escaliers qui mènent à des impasses, des murs de jardin défiguré qui ont longtemps survécu à leur but ; des extra-normal.  Les photographies, prises à travers Paris, Genève, Grenoble et Lyon, forment une réflexion critique sur la modernité architecturale, les constructions moderne en béton apparaissant aujourd’hui comme monstruosités sournoises ou hybrides grotesques de l’architecture traditionnelle et moderne.

 

Manuel illustre bricolage urbain Etienne Delprat
Manuel illustré de bricolage urbain, Etienne Delprat, YA+K et Nicolas Bascop, Editions Alternatives, octobre 2016, 128p., 19 x 25,5 cm, 25 €.

Manuel illustré de bricolage urbain

Il est possible d’investir autrement l’espace urbain, de le réinventer par des aménagements divers, par des hacking de mobiliers et d’espaces publics, par des dynamiques d’appropriation citoyenne, par l’agriculture et le jardinage ou encore en navigant sur les réseaux d’échanges et d’entraide autogérés. Etienne Delprat et Nicolas Bascop invitent à fabriquer des éléments de mobilier urbain divers et variés.

kagan-architectures
Kagan, architectures 1986-2016, dir Nathalie Régnier-Kagan, AAM-Ante Prima édition, septembre 2016, 276p., 25 x 22 cm, 24 €. ISBN 978_2_87143_306_4

Kagan, architectures 1986-2016

Disparu fin 2009 à 56 ans, Michel Kagan était considéré comme une sorte d’enfant prodige par ses frères en architecture néo-moderne. Formé en France, enseignant à Columbia puis à Belleville, il livrait en 1991 avec la cité technique et administrative pour la ville de Paris un bâtiment manifeste qui concentrait les particularités de son écriture architecturale, traits qu’il appliquait simultanément avec une générosité presque excessive sur la cité d’artiste du Parc Citroën-Cévennes. Son écriture se fit ensuite plus pondérée, sans rien renier de sa filiation moderniste, héritage envisagé plus comme une phénoménologie que comme un style. Ainsi, rappelle Jean-Louis Cohen dans un essai introductif, Kagan voyait la promenade architectural non comme une chose ludique, mais un lien social dans une architecture démocratique, de relation. Kenneth Frampton, Franco Purini et d’autres architectes dont il était proche abordent dans différents essais la personnalité et le travail de l’architecte, présenté de façon extensive dans cet ouvrage qui aborde également les projets réalisés depuis sa disparition par l’agence, désormais dirigée par Nathalie Régnier-Kagan, veuve et associé de l’architecte.

African Modernism architecture Independence Ghana Senegal Côte d'Ivoire Kenya Zambia Manuel Herz
African Modernism, the architecture of Independence. Ghana, Senegal Côte d’Ivoire, Kenya, Zambia. Manuel Herz, Park Books, 2016, 640p., 23,5 x 32 cm, 68 €. ISBN 978-3-906027-74-6
Italo Modern Architecture Feiersigner
Italo Modern 2, Architecture in Northern Italy 1946–1976. Martin and Werner Feiersigner, Park Books, 2016, 552p., 16,5 x 22 cm, 48 €. ISBN 978-3-03860-029-9

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

African Modernism

Dans les années 1950 et 1960, la plupart des pays africains obtinrent l’indépendance. L’architecture est devenue l’un des principaux moyens par lesquels les pays nouvellement formés ont exprimé leur identité nationale, illustrant aussi les difficultés, les contradictions et les dilemmes que ces pays ont vécus dans leur processus de construction nationale. Cet ouvrage étudie pour la première fois la relation entre l’architecture et la construction du Ghana, Sénégal, Côte d’Ivoire, Kenya et Zambie. Il comporte 103 bâtiments avec de brefs textes descriptifs, des images, des plans. D’autres essais sur l’Afrique post-coloniale et des aspects et sujets spécifiques complètent ce livre remarquable. Une publication qui coincide avec une exposition à Vitra Design Museum Gallery à Weil am Rhein.

Italo Modern

Avec ces deux volumes enfin traduit en anglais c’est un véritable inventaire, à la qualité photographique rare, de l’architecture moderne de l’Italie du nord entre 1946 et 1976 qu’offre les frères Feiersinger, l’un est architecte, l’autre est photographe.

Mindwalks Shanghai Sensual City Studio
Mindwalks, 8 graphic narratives through Shanghai, Pauline Marchetti / Jacques Ferrier, Sensual City Studio, mai 2016, 288p., 29 x 6 cm, 50 €. ISBN 978-2-9555438-0-1

Mindwalks, 8 graphic narratives through Shanghai

L’enjeu était de s’immerger dans une portion de Shanghai pour s’imprégner de ses ambiances, de ses images, de ses histoires et de les restituer sous forme graphique et narrative, soit 8 cartes. Elles visent moins à situer des éléments topographiques de façon objective qu’à rendre compte de l’expérience vécue et de ses multiples dimensions.

Nomadic Furniture Fineder Geisler Hackenschmidt
Nomadic Furniture 3.0, New Liberated Living ? Martina Fineder, Thomas Geisler, Sebastian Hackenschmidt, MAK Vienna / Niggli Verlag, Zurich, 2016, 272p., 23 x 30 cm, 55 €.

Nomadic Furniture 3.0

44 projets DIY décortiqués dans ce livre dont quelques projets de Gerrit Rietveld, de Viktor Papanek ou encore d’Enzo Mari accompagnent les essais revenant sur l’histoire du Do It Yourself. Ce livre appartient a une collection développée par le MAK (Vienne-Los Angeles).

Atlas Another America Keith Krumwiede
Atlas of Another America, An Architectural Fiction, Keith Krumwiede, Park Books, 2016, 272p., 24 x 32,5 cm, 48 €. ISBN 978-3-03860-002-2
Il Diario del Vento Wind Diary Olaf Nicolai
Il Diario del Vento / Wind Diary, Olaf Nicolai, Les presses du réel, octobre 2016, 208p.,16,5 x 30 cm, 45 €. ISBN : 978-88-97503-88-0

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Atlas of another America

Du nouveau du côté du sub-urbanisme ! Posséder sa maison est une des pierres d’angle du rêve américain mais ce rêve est-il toujours d’actualité avec la crise. Keith Krumweide a construit une satire architecturale – présentée dans le style d’un traité historique – qui imagine un avenir alternatif pour la maison unifamiliale américaine et son habitat indigène, la ville sub-urbaine. Une exposition de la triennale de Lisbonne.

Il Diaro del Vento / Wind Diary

Livre d’artiste documentant les conditions atmosphériques autour du pavillon allemand de la 56e Biennale de Venise. Le relevé météorologique a été réalisé grâce à une station météo installée sur le toit du pavillon, transformé pour l’occasion en lieu performatif et espace d’installation. L’ouvrage comprend également un ensemble de cartes décrivant différentes conditions venteuses auxquelles ont été confrontés les artistes. Edition limitée à 350 exemplaires numérotés et signés par l’artiste. Exposition SNJOR à la Galerie de l’Europe.

SNJOR Christophe Jacrot
SNJOR, Christophe Jacrot, Editions h’Artpon, octobre 2016, 70p., 40 x 32 cm, 55 €.

SNJOR

Terrain de jeu de Christophe Jacrot l’Islande est une terre pour rêver les yeux grands ouverts. Pour rendre le majestueux des paysages islandais les éditions H’artpon ont choisi le grand format et l’impression de haute qualité pour un livre dont le tirage est dès aujourd’hui quasi épuisé.

This Brutal World Peter Chadwick
This Brutal World, Peter Chadwick, Phaidon, septembre 2016, 224 p., 290 x 250 cm, 39.95 €. ISBN : 978 0 7148 7228 5

Archi Brut

Un large aperçu du Brutalisme, fascinant style architectural, avec des exemples prestigieux de constructions brutalistes réalisées entre les années 1950 et aujourd’hui. L’ouvrage met en lumière de nombreux trésors méconnus de l’architecture brutaliste, construits dans l’ancien bloc de l’Est et dans les quatre coins du monde. Il présente les oeuvres des plus grands architectes contemporains, dont Zaha Hadid, Peter Zumthor, Rem Koolhaas, Toyo Ito … et des figures de l’architecture du XXe siècle comme Alvar Aalto, Frank Lloyd Wright, Le Corbusier, Oscar Niemeyer …

 

Bonne lecture ! 

Felice Varini : S’amuser avec la rigueur corbuséenne

Felice Varini : S’amuser avec la rigueur corbuséenne

Après Xavier Veilhan, dans le but de prendre la mesure du lieu, Daniel Buren afin de le maîtriser, Dan Graham dans l’optique de le démultiplier, le designer propriétaire du MaMo (pour Marseille Modulor) Ora Ito a invité Felice Varini à s’emparer du toit corbuséen.

Connu pour son travail sur l’utilisation de la perspective italienne, son œuvre interroge le génie du lieu dans lequel il intervient. Le toit de l’unité d’habitation de Marseille relève du défi pour l’artiste tessinois. Même si c’était une première pour lui de monter sur le toit de « la maison du fada », le Parisien d’adoption, a mis en place son protocole habituel. D’abord il déambule dans les différentes espaces du lieu, repère tel ou tel matériau, se documente sur son histoire. Ensuite il utilise son corps et la hauteur de ses yeux comme étalon pour déterminer le (ou les) points de vue. A Marseille, trois points de vue ont été choisis. Tels des meubles, plusieurs volumes architectoniques peuplent le toit. Pensées à l’échelle de la vue panoramique sur la métropole, les microarchitectures ne rendent pas la tâche facile. Avec discernement Felice Varini a opté pour trois « points de lecture ». Celui aux bandes jaunes se place sur la terrasse devant la façade principale du gymnase. L’autre aux aplats rouges est à l’opposé, côté école et bassin. Le troisième se situe à l’intérieur du gymnase et entremêle le jaune et le rouge. Juste après avoir fermé la porte qui donne sur le toit-terrasse et avoir effectué un 360° degré, aspiré par la lumière qui l’entoure, le visiteur essaie immédiatement de trouver l’emplacement idéal pour comprendre et lire la peinture murale « parfaite ». Cette quête de compréhension et de pureté absolue du point de vue est certainement à mettre sur le compte de notre aliénation volontaire à la perspective albertienne. Tout le travail de Varini aspire à détruire cette convention. Il souhaite nous emmener ailleurs, dans la multitude, la fragmentation, pas dans l’unique ni la pureté.

Christophe Le Gac

 

Retrouvez ce reportage dans CREE 377 Habiter / Intérieurs, en kiosque le 29 juillet 2016

 

Felice Varini, A ciel ouvert, MaMo, Centre d’art de la Cité Radieuse, 280 Boulevard Michelet, 13008 Marseille

Agenda : A ciel ouvert, Felice Varini au MaMo

Via Intramuros : Les jeux graphiques de Felice Varini au MaMo à Marseille

https://mamo.fr