Best of 2017 : équipements culturels et sportifs

Best of 2017 : équipements culturels et sportifs

La revue Architectures CREE revient sur les constructions qui ont marqué l’année. Programme par programme, elle a sélectionné pour vous des réalisations qui ont émergé du paysage français, et vous en propose la relecture. Ci-dessous, notre best of 2017 d’équipements culturels et sportifs. 

 

Le Louvre Abou Dhabi : la revue de presse du 15 novembre 2017

De Paris … puis à Lens … le Louvre s’invite à Abou Dhabi ! Il est situé sur un archipel au large de l’île Saadiyat, une île artificielle de la côte de la capitale des Émirats arabes unis. « Il est inhabituel de trouver dans la mer un archipel construit. Il n’est pas évident qu’il soit possible d’y accoster en bateau, de trouver des pontons pour y accéder à pied depuis la côte. » précise son architecte, Jean Nouvel. « Double coupole de 180 mètres de diamètre, plate, géométrie radiante parfaite, perforée dans une matière tissée plus aléatoire, créant une ombre ponctuée d’éclats de soleil. » continue le Pritzker. Des espaces semi-extérieurs pour des installations et des blocs de cubes blancs pour les expositions : une « ville-musée ». « Il veut créer un monde accueillant, associant dans la sérénité les lumières et les ombres, les reflets et les calmes. » poursuit Jean Nouvel.

 

La Cité des Électriciens à Bruay, fragment d’un patrimoine minier en devenir

Archétype de la cité minière du XIXe siècle, la Cité des Electriciens de Bruay-la-Buissière, dans le Nord-Pas-de-Calais, appelée ainsi en référence aux noms de ses rues, est construite par la compagnie des mines entre 1856 et 1861.Témoignage de l’habitat des familles de mineurs, ces 37 logements sont nés d’une révolution industrielle qui a radicalement bousculé le paysage existant. De ce patrimoine en déshérence,  faut-il conserver les ensembles de vilains et communs corons ? Les habitants, dans une situation sociale difficile, ont longtemps eux la volonté d’effacer cette page. Mais en 2007, le tournage de quelques scènes de Bienvenue chez les Ch’tis rend la cité populaire, jusqu’à ce que la Communauté d’agglomération de Bruay-Béthune lance une consultation pour la réhabilitation du site, remportée en 2013 par l’atelier d’architecture Philippe Prost. En préservant l’existant et en lui affectant de nouveaux usages, le projet de l’architecte conserve et adapte ce patrimoine ordinaire, que les acteurs locaux qualifient de « monument du quotidien ».

 

La piscine des Amiraux d’Henri Sauvage restaurée par François Chatillon

Cachée au cœur d’un immeuble en gradin de la rue Hermann Lachapelle, dans le 18e arrondissement, la piscine des Amiraux, réalisée en 1930 par Henri Sauvage, compte parmi les plus ancienne de Paris. Outre sa typologie novatrice, son ossature poteaux poutres en béton armé, son système de chauffage et de ventilation mécanique, ses lumières électriques incorporées dans la structure … le tout fait de cet ensemble un édifice remarquable qui lui vaut d’être classé à l’inventaire des monuments historiques en 1991. Toutefois, les mises aux normes successives des années 1980 et 1990 ont fini, pour de bonnes « mauvaises raisons » à faire disparaître les aménagements novateurs de l’œuvre initiale et la beauté qui en résultait. François Chatillon a pris le parti de restituer la piscine dans un état proche de son état initial, l’enjeu étant d’intégrer des usages contemporains dans un patrimoine à conserver.

 

A l’ouest parisien, la Seine Musicale

Dans le florilège des équipements musicaux sortis de terre ou récemment rénovés, citons la Seine Musicale ! Figure de proue de la métamorphose en cours, la Cité de Shigeru Ban et Jean de Gastines, s’inscrit dans la  continuité  du plan urbain de l’île Seguin. Sa silhouette générale allongée sur 324 m, aux longs murs de béton, rappelle celle d’un destroyer dont le pont s’incline pour laisser émerger l’Auditorium, un nid de bois tressé aux formes galbées. Quoi qu’il en soit, l’architecture se met au service de l’ambition programmatique – dont les principes restent proches de ceux de ses consœurs – favorisant l’éclectisme, et répondant à l’ambition internationale par un élément signature.

 

Musée Camille Claudel : entre imbrication et dispositif

Le musée dédiée à la sculptrice Camille Claudel, amante de l’illustre Auguste Rodin, occupe à la fois l’ancienne maison de la famille Claudel à Nogent-sur-Seine, restaurée et réhabilitée, et un nouvel édifice. « Je ne pense pas qu’il s’agisse d’un musée pour Camille Claudel, conclut Adelfo Scaranello, architecte. Peut-être y a-t-il une correspondance avec son histoire difficile, même son musée a finalement été laborieux à réaliser. Mais je crois avoir dessiné un musée dédié à la sculpture, dont les référents ne sont finalement que la brique moulée à la main et les cadres de lumière naturelle. Un autre changement de destination reste possible » continue l’architecte, qui est allé jusqu’à cacher une porte anticipant des mutations futures, un acte que n’aurait pas renier Numérobis !

 

La rédaction d’Architectures CREE

 

 

La Cité des Électriciens à Bruay, fragment d’un patrimoine minier en devenir

Qui aurait cru, 132 ans après la publication du Germinal d’Emile Zola, que les noirs corons puissent un jour devenir patrimoine ? Frappé de plein fouet par la désindustrialisation, le bassin minier du Nord est en pleine revitalisation. Si le Louvre-Lens de Sanaa constitue une opération phare, c’est aujourd’hui à 25km à l’ouest que les petites maisons rouges de la Cité des Électriciens de Bruay-la-Buissière font peau neuve. En décembre, centres d’interprétation, résidences d’artistes et gîtes d’étapes conçus par Philippe Prost consacreront la mue de cet ancien coron.

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Cité des Electriciens – Bruay-La-Buissière Philippe Prost, architecte / AAPP © adagp – 2017 © Aitor ORTIZ

Archétype de la cité minière du XIXe siècle, la Cité des Electriciens de Bruay-la-Buissière, dans le Nord-Pas-de-Calais, appelée ainsi en référence aux noms de ses rues, est construite par la compagnie des mines entre 1856 et 1861.Témoignage de l’habitat des familles de mineurs, ces 37 logements sont nés d’une révolution industrielle qui a radicalement bousculé le paysage existant. « L’implantation de la mine a urbanisé des secteurs agricoles qui ne l’étaient pas, et a transformé durablement le paysage qui a vu apparaitre fosses, chevalets, terrils et cités », précise Isabelle Mauchin, responsable de la Cité des Électriciens au sein de la Communauté d’agglomération. Fleuron et fierté des habitants, la mine reste aussi un traumatisme, la fermeture des puits entrainant la récession économique. Sur les 120 km de long et 12 km de large du bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, les séquelles liées à trois cents ans d’activité restent palpables et lisibles sur le territoire. Ses constructions sont le marqueur d’une mémoire douloureuse. De ce patrimoine en déshérence,  faut-il conserver les ensembles de vilains et communs corons ? Les habitants, dans une situation sociale difficile, ont longtemps eux la volonté d’effacer cette page. Mais en 2007, le tournage de quelques scènes de Bienvenue chez les Ch’tis rend la cité populaire. En 2012, le classement au patrimoine mondial de l’UNESCO du bassin minier du Nord-Pas-de-Calais achève de changer la donne. La Cité des Électriciens, un des plus ancien coron des Hauts de France, fait partie des cinq cités-pilotes labélisées au titre de « Paysage culturel évolutif vivant ». Ce classement implique que le territoire ne sera pas mis sous cloche, ni figé ni muséifié, mais qu’il sera nécessaire de l’accompagner dans sa mutation. Cette même année 2012, la Communauté d’agglomération de Bruay-Béthune lance une consultation pour la réhabilitation du site, remportée en 2013 par l’atelier d’architecture Philippe Prost. En préservant l’existant et en lui affectant de nouveaux usages, le projet de l’architecte conserve et adapte ce patrimoine ordinaire, que les acteurs locaux qualifient de « monument du quotidien ».

Habiter le patrimoine ordinaire

Ces humbles bâtiments aux abords délaissés et progressivement abandonnés étaient organisés selon un plan masse orthogonale ; cinq longères sont disposées à la perpendiculaire d’un corps central transversal. Ils appellent une affectation en rapport avec leurs identités, à savoir, un équipement muséographique, le centre d’interprétation de l’habitat et du paysage miniers réparti entre deux bâtiments, l’un restauré, l’autre contemporain. Il est assorti de résidences d’artistes, d’ateliers pédagogiques et de gites d’étapes touristiques, égrenés dans les bâtiments existants en fonction de leurs capacités respectives. Aussi, les annexes fragiles que l’on appelle carins – qu’on pourrait assimiler à des abris de jardins – sont restaurées afin d’accueillir de petits lieux insolites comme un espace de restauration, un sauna, etc.

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1 – 1856-1861 : construction de la cité n°2 par la compagnie des mines de Bruay

2- 1880-1890 : construction des carins dans les jardins

3 – 1910 : construction de baraquements pour abriter les ménages réfugiés

4 – 2017 : réhabilitation de la Cité des Electriciens, création du centre d’interprétation du paysage et de l’habitat minier

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Cité des Electriciens – Bruay-La-Buissière Philippe Prost, architecte / AAPP © adagp – 2017 © Aitor ORTIZ

La Cité des Électriciens est fondée sur d’anciennes carrières de marnes. Il a donc fallu au préalable consolider le sous-sol afin d’éviter tout risque d’effondrement, une tache ardue puisqu’il n’existait aucun plans des galeries souterraines, explique Philippe Prost.  L’ensemble des espaces extérieurs, pensé avec les paysagistes de l’Atelier FORR, reconstitue le parcellaire des jardins à partir des traces encore visibles. « La trame ancestrale des potagers est exhumée pour redessiner le paysage alentour » attestent-ils. Sur une parcelle faisant parie intégrante de l’histoire du site, puisque située à l’exact emplacement d’un des baraquements construits en 1910 pour l’accueil des réfugiés de la Grande Guerre et démolis cinquante ans plus tard, le centre d’interprétation est logé, pour sa partie paysage, dans une construction neuve. D’expression contemporaine, il reprend le gabarit du corps central ainsi que la partition structurelle de ses murs de refends. La forme iconique du toit à deux pentes est détournée au profit d’un monolithe recouvert d’une carapace de tuile de parement vernissée rouge, posée sur une ossature bois et métal. Les refends transversaux se retrouvent eux sous forme de failles vitrées continues du mur au plafond, scandant l’espace muséographique tout en lui apportant de la lumière naturelle. En bordure de terrain, il cadre des vues d’un coté sur le lointain terril, de l’autre sur la cité elle-même.

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Cité des Electriciens – Bruay-La-Buissière Centre d’interprétation sur l’habitat minier Philippe Prost, architecte / AAPP © adagp – 2017 © Aitor ORTIZ
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Cité des Electriciens – Bruay-La-Buissière Centre d’interprétation sur l’habitat minier Philippe Prost, architecte / AAPP © adagp – 2017 © Aitor ORTIZ
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Cité des Electriciens – Bruay-La-Buissière Centre d’interprétation sur l’habitat minier Philippe Prost, architecte / AAPP © adagp – 2017 © Aitor ORTIZ
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Cité des Electriciens – Bruay-La-Buissière Centre d’interprétation sur l’habitat minier Philippe Prost, architecte / AAPP © adagp – 2017 © Aitor ORTIZ
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Cité des Electriciens – Bruay-La-Buissière Centre d’interprétation sur l’habitat minier Philippe Prost, architecte / AAPP © adagp – 2017 © Aitor ORTIZ

 

Quand aux espaces rénovés, ils adoptent des moyens et des techniques actuelles sur mesure, pour répondre aux exigences base consommation (BBC). L’architecte mêle réflexion technologique et dimension mémorielle. Par exemple, l’apport de la lumière naturelle par les murs nord des habitations est traité par la mise en œuvre de moucharabiehs, un travail sensible sur la géométrie de la brique qui évite de percer et de dénaturer les murs pleins. Autre mesure, l’isolation par l’intérieur, garantissant la préservation de l’apparence architecturale, de la maçonnerie en brique aux menuiseries en bois, toutes équipées d’un châssis à double vitrage sur les percements d’origine. Un raisonnement écologique qui s’articule avec la politique énergétique développée par le Nord-Pas-de-Calais, une région qui cherche à mettre en pratique les théories de la Troisième Révolution Industrielle, fondée sur le couplage des technologies de l’Internet et des énergies nouvelles, défendues par l’économiste américain Jeremy Rifkin, consultant, aujourd’hui, sur ce territoire.

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Cité des Electriciens – Bruay-La-Buissière Philippe Prost, architecte / AAPP © adagp – 2017 © Aitor ORTIZ
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Cité des Electriciens – Bruay-La-Buissière Philippe Prost, architecte / AAPP © adagp – 2017 © Aitor ORTIZ

Amélie Luquain

 

Fiche technique

Réhabilitation et extension de la Cité des Électriciens à Bruay-la-Buissière, 62700, site classé au patrimoine mondial de l’humanité UESCO au titre de « Paysage culturel évolutif », 5ème site remarquable du Bassin Minier du Nord-Pas-de-Calais Programme : Centre d’interprétation de l’habitat et du paysage minier – 4 résidences d’artistes – 4 gîtes – 13 carins : usages variés (exposition, carin frites, chambre, sauna, jeux, poulailler, abri de jardin) – 1 carin mobile Situation : Bruay-la-Buissière sur la route nationale Anatole France, entre ville et terrains agricoles.  Maîtrise d’ouvrage : Communauté d’agglomération Béthune-Bray Architecte mandataire : AAPP – Atelier d’Architecture Philippe Prost Equipe de maîtrise d’œuvre : FORR paysagistes / Verdi ingénierie BET TCE + OPC / TechniCity BET HQE / Du & Ma, scénographie / Catherine Mariette, muséographie / Atelier Villar+Vera, graphisme Calendrier : études de février à novembre 2013 / chantier d’octobre 2014 à septembre 2017 / inauguration décembre 2017 Surfaces : site 14 673 m2 / centre d’interprétation – de l’habitat > réhabilitation 500 m2 – du paysage minier > construction neuve 250 m2 / résidences d’artistes 400 m2 / gîtes 340 m2 / carins 200 mEstimation prévisionnelle travaux : 9,2 M€ HT Mission : Base + EXE + SYN + OPC + Muséographie Prix : 2014 prix du jury au concours d’architecture Bas Carbone EDF / 2016 1er Prix Architecture Bâtiment tertiaire

Courtesy Philippe Prost / Aitor Ortiz